De prime abord, la couverture originelle de ce premier album du duo Yves Sente - André Juillard n'est pas très engageante. On devine qu'il va être question d'espionnage mais on a la désagréable impression que l'aventure ne va pas être au rendez-vous et que la pertinence du dessin attendra. Le visage de Mortimer n'est guère convaincant et le mystère qui l'entoure semble peu épais. C'est sûrement parce que cette couverture a été ratée qu'elle a été ensuite refaite. D'abord parce qu'elle ne rend pas justice au travail de Juillard qui, dès ce premier opus, fait preuve d'une remarquable maîtrise de l'univers de Jacobs. Ensuite parce qu'elle annonce mal une aventure rondement menée.


Si elle est on ne peut plus classique (hormis son ouverture et son postulat aux confins du fantastique), son déroulement reprend les codes traditionnels de l'espionnage avec ses espions, ses contre-espions et ses espions dormants. Ancré dans l'histoire de la guerre froide, le scénario, s'il n'offre que peu de surprises, est particulièrement efficace. Il reprend également l'univers et les personnages créés par Jacobs ou par Van Hamme et Benoit, assurant ainsi une unité des plus estimables. Le nouveau duo apporte aussi déjà sa touche avec la présence de personnages féminins ayant un impact sur les agissements de nos héros. Hermétiques jusque là à une gente féminine plutôt absente, ils vont, au fil des albums, dévoiler une dimension sentimentale que ne leur avait jamais prêté Jacobs. Cet élément permettra de poser de nouveaux enjeux dans certains albums.


Carrée et aboutie, cette première aventure duo duo Sente - Juillard souffre de quelques défauts qui, peu à peu, seront gommés dans les opus suivants. La fluidité de l'intrigue n'est pas totale, l'expression des héros pas toujours totalement aboutie et, surtout, l'ensemble est particulièrement très bavard. Si les dialogues ou les narrations sont rarement inutiles (ce qui pouvait être le cas chez Jacobs), leur abondance aboutit ici à des textes écrits très petits qui sont particulièrement fatigants. Par ailleurs, certains dessins, réduits dans de toutes petites cases, ne rendent pas justice aux décors très soignés de Juillard. Autrement dit, on peut penser que l'album aurait gagné à se déployer en quelques pages supplémentaires afin de gagner en lisibilité. Pour un premier album, en tout cas, de très bons jalons sont ici posés.

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le 14 août 2021

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PIAS

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