Lynchéen et Baudelairien, Gustave Babel inaugure impeccablement des contes d’un nouveau genre… tenta

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Attention bijou impensable, pas cataloguable pour un carat, OVNI dantesque et tentaculaire. Tentaculaire, le mot est lâché, et en appelant sa nouvelle série (de one-shot?) Les contes de la pieuvre, Gess avait forcément cette idée en tête. Se renouvelant sans cesse, le premier papa de Carmen McCallum, qui nous avait aussi offert une belle évocation du 11 janvier avec Serge Lehman, nous revient dans un genre qui lui va comme un gant, à un jet d’encre du fantastique. À écouter, pourquoi pas, au son des Pixies. Where is my mind.


Résumé de l’éditeur : Juillet 1913 : La Pieuvre envoie Gustave Babel abattre un homme, mais quand il arrive, ce dernier est déjà mort. Décembre 1913 : nouveau contrat, mais cette fois, l’homme se suicide sous ses yeux. 1914 : infiltré dans les rangs de l’armée allemande, Babel voit sa cible disparaître sous des tirs d’artillerie. Profondément déstabilisé, il va devoir affronter visions et cauchemars qui le mèneront tout droit à un passé enfoui et à son pire ennemi : L’Hypnotiseur.


Dès la couverture (luxueuse), le ton est donné. Est-ce un arbre ou une pieuvre qui hante l’arrière-plan ? Peu importe. Toujours est-il que le dénommé Gustave Babel semble peser le pour et le contre, le stop ou l’encore du revolver qui l’a accompagné dans ses aventures meurtrières. L’attribut d’un sujet en bout de course traqué jusque dans ses nuits sous le poids d’immondes cauchemars. Gustave est en sursis.


Et quitte à entamer son dernier voyage, autant le démultiplier au fil des souvenirs et des séjours à l’étranger… facilités par une connaissance incroyable de toutes les langues du monde. Dans un Paris populaire en diable comme à Port-Saïd (dans lequel on jurerait apercevoir un Indiana Jones) ou en Argentine, Gustave qui porte bien son nom est comme un poisson dans l’eau, même s’il s’empoisonne l’esprit par de sombres pensées. Il faut dire que depuis qu’il rate successivement les gages que la pieuvre lui pro… lui impose, Gustave sait que son temps est compté.


Explorant le premier quart du vingt-et-unième siècle, c’est un récit impressionnant que nous livre Gess, se servant de thèmes mafieux et criminels pour mieux explorer la manière dont un être peut basculer de l’ombre à la lumière, et vice-versa surtout. Animé par les poètes comme Baudelaire, aidé par un sosie officiel de Gérard Depardieu, Gustave (qui, lui-même possède des traits très Lynchiens) pérégrine dans ce monde qui va déjà trop vite pour lui.


Avec cet ouvrage indescriptible où se marie magie, chimères et aventure au long cours, entre mille autres choses, encore plus quand on sait que le présent album était déjà annoncé en… 2011, Gess semble n’avoir vécu jusqu’ici que pour donner vie à ces contes aussi macabres que vivifiants. À l’image de ces couleurs qui, en un clignement d’yeux, permettent de restituer l’ambiance de ces années-là dans ces pays-là.


Cela faisait très longtemps que Gess n’avait pas été l’auteur complet d’un récit. Ça tombe bien, cela faisait aussi très longtemps que nous n’avions pas lu un roman graphique aussi prenant et cinglant, mariant si bien esprit, forme et fond. D’une classe infernale.

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Créée

le 13 mars 2017

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