La Parenthèse
7.8
La Parenthèse

BD (divers) de Elodie Durand (2010)

Échaudée par mon expérience avec Pénélope Bagieu, me voilà plus que méfiante à l'égard du premier album d’Élodie Durand, recueillant lui aussi éloges et dithyrambes. D'autant que l'introduction (j'avais survolé les premières pages en librairie), un peu trop dramatique à mon goût, n'avait fait que me conforter dans mes a priori. En plus, pas de chance, une faute de grammaire dès la troisième phrase (le genre de truc qui m'agace vraiment) ! Bref, j'étais partie pour me taper une histoire larmoyante, un brin impudique, que les critiques portaient aux nues parce qu'il serait politiquement incorrect d'éreinter une auteure qui a subi une grave maladie.


Du coup, j'ai un peu honte de moi, maintenant... Je ne m'attendais pas, en fait, à ce que ce passage de la vie d’Élodie Durand soit aussi empreint de souffrance. Et aussi intéressant, au final. C'est l'histoire, assez simple, en fait, d'une jeune fille qui s'est découverte épileptique et qui, malheureusement pour elle, a connu des complications (plutôt rarissimes, d'après ce que j'ai compris) qui l'ont amenée à s'enfoncer inexorablement dans la maladie. Rien de bien original, me direz-vous. Et, en effet, le récit souffre d'une narration (et là, je parle de l'aspect littéraire de la chose) un peu faible. Élodie Durand a choisi de raconter son histoire en voix off, ce qui met en avant les lacunes de son écriture, très plate, et il faut bien le dire, un peu ennuyeuse. Reste que ce qui lui est arrivé n'est pas banal et qu'elle a très bien su exprimer, avec relativement de pudeur, la perte d'identité dont elle a souffert. En effet, c'est là le sujet principal de l'album : atteinte d'une maladie apparemment incurable, elle a vu sa mémoire s'effilocher inexorablement et a atteint un stade où elle n'était plus qu'un zombie (elle dormait presque tout le temps). Le passage chez la neuropsychiatre, où, à force de tests, elle s'aperçoit qu'elle ne connaît plus l'alphabet et qu'elle ne sait plus compter, est particulièrement saisissant.De ce que j'ai écrit jusque là, on pourrait déduire qu'il s'agit d'une histoire particulièrement triste et fataliste. Mais non ! La grande force de ce récit, c'est d'avoir été construit en palindrome : à la descente aux Enfers succède, en symétrie, le retour à la vie. Et ça fait du bien, car la première moitié du récit est tout de même assez éprouvant. Je ne suis pas très enthousiasmée par le dessin général, mais certaines planches, plus ou moins indépendantes de la narration, sont sublimes d'expressivité (je vous en montre quelques une ici), et c'est grâce à elles, finalement, que cet album a remporté mon adhésion. Et puis, Élodie Durand a commis un vrai travail de mise en page, ce qui n'est pas si courant. Je ne la considère donc pas forcément (pour l'instant) comme une très bonne narratrice, mais je pense qu'elle a un potentiel énorme en tant que dessinatrice et un bel avenir dans la BD.

Cthulie-la-Mignonne
7

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 7 mars 2015

Critique lue 327 fois

2 j'aime

Critique lue 327 fois

2

D'autres avis sur La Parenthèse

La Parenthèse
Khidarion
8

Critique de La Parenthèse par Khidarion

Un très beau témoignage sur l’épilepsie, comment survivre avec cette terrible maladie, et remonter doucement la pente. A la différence de l'Ascension du Haut-Mal, de David B., le récit est la...

le 27 févr. 2014

5 j'aime

La Parenthèse
Scoubi
9

Critique de La Parenthèse par Scoubi

La Parenthèse, c'est l'histoire (autobiographique) d'une malade qui n'admet pas qu'elle est malade. De fait, cela induit une distance entre le récit et sa narratrice, et annihile tout effet de...

le 15 août 2011

5 j'aime

La Parenthèse
Cthulie-la-Mignonne
7

Talent en devenir

Échaudée par mon expérience avec Pénélope Bagieu, me voilà plus que méfiante à l'égard du premier album d’Élodie Durand, recueillant lui aussi éloges et dithyrambes. D'autant que l'introduction...

le 7 mars 2015

2 j'aime

Du même critique

« Art »
Cthulie-la-Mignonne
1

Halte au plagiat !!!

J'ai presque envie de débuter ma critique par "C'est une merde", pour reprendre les propos d'un des personnages de la pièce. Certes, c'est un début un peu vulgaire, mais certainement pas plus que...

le 14 févr. 2019

15 j'aime

7

Solaris
Cthulie-la-Mignonne
9

Mélancoliques mimoïdes

Un des romans les plus marquants qu'il m'ait été donné de lire, et qui demande sans doute à être lu et relu pour en saisir toute la portée. L'histoire de Kelvin, rejoignant trois collègues sur la...

le 5 mars 2016

15 j'aime

6

Bleu - Histoire d'une couleur
Cthulie-la-Mignonne
8

Incontournable Pastoureau

J'avais commencé par regarder, il y a déjà quelques temps, les conférences en ligne de Michel Pastoureau sur les couleurs à l'auditorium du Louvre. Et c'est parce qu'elles m'ont captivée que j'ai...

le 7 mars 2015

14 j'aime

8