« Ekhö monde miroir » est une série au concept intéressant. Comme son nom l’indique, Ekhö est un monde miroir de la Terre. On y retrouve le même mode de vie que sur notre planète à quelques nuances près : les dragons remplacement les avions de ligne ou les wagons de métro sont sur le dos d’étranges mille-pattes… Cette parenté entre les deux univers autorisent bon nombre d’allusions aux travers de la société et facilitent les moqueries sur le quotidien de chacun d’entre nous. Cela offre naturellement un terrain d’expression à Christophe Arleston scénariste friand de ce type d’humour.


Afin d’optimiser ce parallèle entre les deux mondes, les auteurs insèrent l’intrigue de chaque tome dans une grande capitale. Ce cinquième tome intitulé « Le secret des Preshauns » s’installe dans la « cousine » de la Ville éternelle Rome. La magie de la ville couplée aux mystères de la « cité vaticane » crée un terreau fertile à l’imagination narrative d’Arleston. Pour mémoire, les opus précédents avaient fait voyager vers les alter egos de New York, Paris, Los Angeles et Barcelone.


Le titre pourrait intriguer certains lecteurs : qu’est un Preshaun ? Il s’agit d’une particularité propre à Ekhö. Leur apparence de petit rongeur éveille la sympathie. Le fait qu’ils semblent diriger les arcanes politiques locaux éveille le respect. Le fait qu’ils puissent se transformer en monstres féroces s’ils n’ont pas leur dose de thé éveille la crainte. Bref, tout en étant souvent au second plan ou dans l’ombre, les Preshauns sont au centre de toutes les aventures. Il est donc évident que les instances romaines sont un lieu d’expression idéal de leurs pouvoirs.


Néanmoins, malgré leurs nombreux attraits, les Preshauns ne sont pas les héros de l’aventure. L’héroïne a les jolies courbes et le sourire craquant de la sympathique Fourmille Gratule. La génèse de la série nous avait fait découvrir sa « transition » entre la Terre et Ekhö. Nous avions donc suivi ses pas avec curiosités dans ce nouveau monde aux mœurs divers et variés. Les hasards de la vie avaient fait qu’elle a effectué ce voyage avec Yuri Podrov. Les deux protagonistes s’entendent comme chien et chat mais s’avèrent inséparables. Leur duo est l’attrait principal de la saga. Leurs chamailleries constantes font rire et alimentent la bonne humeur de l’ensemble.


L’originalité et les caractéristiques de l’univers et des personnages sont au service d’une intrigue qui répond à chaque tome aux mêmes codes. Fourmille et Yuri se trouvent toujours embrigadé dans une histoire qui les fait enquêter sur un meurtre ou une disparition. La cité qui les accueille oriente la thématique de la trame. Ici, le scénario accompagne les protagonistes dans les enjeux politiques de la cité « vaticane ». Le potentiel de ce choix est intéressant. Les auteurs éveillent la curiosité quant aux révélations qui risquent d’accompagner les pérégrinations de tout ce petit monde. D’ailleurs, le lecteur ne sera pas déçu car il en apprendra beaucoup sur les Preshauns. Les zones d’ombre qui les accompagnent depuis le début de la série sont partiellement éclairées dans cet opus. Le statut et le rôle de Fourmille semblent être amenés à évoluer. Néanmoins, cela n’empêche pas l’histoire de manquer légèrement de dynamisme. Je regrette que les ingrédients de la trame ne soit pas pleinement exploités. J’ai le sentiment que les rebondissements auraient pu être plus nombreux et le suspense aurait pu être plus intense. D’autant plus que cette « légèreté » du scénario ne se fait pas au profit de la dimension comique. J’ai eu le sentiment de sourire davantage par habitude que du fait des gags de l’ouvrage. C’est dommage.


Concernant les dessins, le travail d’Alessandro Barbucci s’inscrit dans la continuité de celui entrevu dans les épisodes précédents. Son trait correspond à l’atmosphère jeune, rythmée et parfois excessive de la narration. Je regrette que la construction du scénario lui laisse moins de place pour faire vivre les décors de ce monde haut en couleur. J’ai le souvenir que les premiers tomes étaient plus denses dans ce domaine. Malgré tout, cela ne l’empêche pas de maîtriser avec talent les scènes d’action et le rythme parfois soutenu des aventures de Fourmille. Les couleurs de Nolwenn Lebreton accompagnent parfaitement l’ambiance divertissante de la lecture.


Pour conclure, ce cinquième tome s’inscrit dans la continuité de la saga. Son principal attrait réside dans les révélations faites sur les Preshauns et sur l’évolution à venir du rôle de Fourmille à Ekhö. Les jalons sont posés pour offrir d’autres enjeux à l’intrigue et faire sortir la série du ronronnement qui l’accompagne depuis quelques épisodes. Néanmoins, pour avoir confirmation de ce changement, il faudra attendre la parution du prochain opus. Mais cela est une autre histoire…


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Eric17
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le 8 juil. 2016

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