Petite série médiévale catholiquement correcte à l'intention des lecteurs d' "Astrapi" (7-11 ans), "Angelot du Lac", en dépit de son titre général qui sent trop le jeu de mots un peu démagogique, raconte la vie d'un préadolescent né dans les affres, les ruines et l'absence de repères de la Guerre de Cent Ans. Orphelin comme il se doit, Angelot subit l'influence du milieu qui a bien voulu le recueillir : de pauvres errants, dénué de tout, mais composé de jeunes, sympas et le coeur sur la main.


Catholique, mais pas coupé du réel. Angelot, élevé par ces vagabonds, devient comme eux voleur de poules et délesteurs de bourses sur les marchés. Manière d'affirmer que chacun subit l'influence du milieu qui l'a éduqué, bien qu'il ne soit pas moral de voler, et pas seulement aux yeux des préceptes catholiques. Un vrai progrès par rapport à d' "autres religions" qui vous amputeraient des deux mains sans plus de façons...


On ne dévoilera pas trop l'intrigue. Disons qu'il y a les ingrédients d'un bon roman picaresque, mais adapté aux enfants. L'intention documentaire et pédagogique d'Yvan Pommaux est évidente : faire sentir aux enfants d'aujourd'hui, même pas très riches, qu'ils sont des privilégiés de l'histoire : ils n'ont pas faim, pas froid, ils ont des parents, ils ne sont pas pris entre deux partis de guerriers, ils sont (relativement) protégés contre les voleurs et les assassins, les loups ne leur courent plus après...


Quand Angelot grandit (mais n'est pas encore adolescent), l'amour fraternel-copain de sa bande de gentils malfrats aussi orphelins que lui se complique des inévitables options amoureuses, et l'on verra qu'Angelot est à la quête d'un amour, pas sexuel, mais tout de même fort touchant (planche 49).


Yvan Pommaux sacrifie au rite qui consiste à insérer une thématique symbolico-poétique par-dessus les aventures classiques que tout le monde attend; ce premier tome parle de loups, qui, par deux fois au moins, jouent un rôle positif, une fois en s'attaquant aux méchants, l'autre fois en sauvant Angelot de l'hiver. Plus original : il y a un bienveillant meneur de loups dans l'affaire, type de personnage que je respecte depuis Claude Seignolle.


Le dessin - destiné aux enfants - est d'une ligne très claire et très lisible. Les tons colorés trop vifs sont absents de l'album, sauf précisément dans une effrayante scène de guerre. Les vêtements, scrupuleusement reconstitués (XIVe siècle - voir planche 21) sont en général mal ajustés et pleins de plis. Les petits chéris d'aujourd'hui, formatés dès le berceau par les délires tyranniques de la mode vestimentaire - pour ne parler que d'elle - doivent apprendre qu'avoir de quoi se couvrir, c'est déjà beaucoup. On apprécie les décors intérieurs (planches 7 et 8, 15 et 16, 41, 45), les maisons à colombages, les cabanes et paillotes sommaires, la forêt mystérieuse, le château trônant au-dessus d'un minuscule hameau (planche 9), un très bel ensemble cathédrale (un peu bizarre quand même)-pont couvert-fortifications planche 38.


Angelot, qui se débrouille bien avec sa fronde, se fait donner des cours de culture médiévale (ressources contenues dans la forêt (planches 13 et 14), et légende de Tristan et Yseut - planche 37.


Touchant, mouvementé et bien documenté, mais simplifié à l'usage d'une perception enfantine.

khorsabad
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le 28 juin 2015

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