Noir c'est noir

On croit s'attendre à un énième polar-comics, un peu barré, articulé autour du concept un poil racoleur : pour assouvir votre vengeance après votre vie brisée, un mystérieux inconnu vous fait don d'un flingue, 100 bastos, et une immunité totale : ni la police ni personne ne vous arrêtera jusqu'à accomplissement de votre vendetta.

Le premier chapitre n'est pas vraiment le meilleur, dur à aborder (mon dieu les dialogues entre gang-bangers, il faut parfois lire à autre voix pour saisir le sens), et balade le lecteur sans lui donner beaucoup de clés. Mais les auteurs trouvent rapidement le tempo à partir de la partie 2, et dans les tomes suivants.

Au final c'est une oeuvre très sombre, renouvelée et surtout inattendue :
-Chaque personnage est fouillé sans retenue, au point de faire parfois douter du coté fictionnel du récit...On travail les poncifs du genre (l'homme de main psychopate, la latino rebelle, le barman brisé...), mais quand c'est bien fait, c'est comme le pot-au-feu de mamie : on en reprend.

-La trame de fond est classique, mais prenante, et trouve sa force dans des dialogues chiadés comme rarement: La VO est absolument indispensable, et avoir vu The Shield et The Wire vous serra d'un grand secours. Certains ont parlé de "dialogues du quotidien" pour décrire les scènes anodines, parfois inutiles, qui ponctuent le récit. Mais c'est dans ces parenthèse à priori facultatives que le bouquin trouve sa substance et sa force.

-Le dessin quand à lui est simple, puissant et va comme un gant au scénarii qui composent cette fresque : du Barrio Latino des gangs aux arrière salles sombres de bars mal-famés, l'ambiance est palpable, et le rythme de l'action respecté.

Un excellent comic donc, à lire la nuit, au calme, et de préférence en sirotant votre pire whisky.