En raison du titre et du synopsis, je m'attendais à un manga narrant l'histoire d'une famille dont tous les membres seraient des petits génies dans leur genre, ce qui leur permettrait de résoudre diverses situations amenées par la mangaka. Tensai Family Company commence dans ce sens, et je pense même que c'était ce que Tomoko Ninomiya (aussi auteur de Nodame Cantabile) avait initialement prévu, avant d'évoluer vers un registre bien différent.
Au début, donc, nous découvrons Katsuya, lycéen brillant ne jurant que par l'argent et le travail ; un garçon antipathique car il n'hésite pas à asséner cette vérité suprême : il est beaucoup plus intelligent que ses camarades de classe, et infiniment plus réaliste. Son cauchemar revêt la forme de deux olibrius que sa mère décide d'incorporer à leur famille, et qui sont ses parfaits contraires car totalement laxistes et globalement improductifs, même si nous comprenons bien vite qu'ils possèdent des qualités servant à justifier le titre de la série ; ils évoluent juste dans un registre différent de celui du personnage principal. Évidemment, une opposition de styles aussi différents ne pouvait provoquer que des étincelles, et cela ne manque pas, ce qui permet à ce seinen de profiter d'un ton avant tout humoristique.
Par la suite, l'auteur semble perdre tout espoir et cela se sent. Elle nous montre l'envers du décor des grandes entreprises nippones et leurs luttes politiques internes, nous parle de réalité économique, de crise financière, d'explosion de la bulle, et de faillites à répétition. Réaliste oui, intéressant tout autant, mais quand même légèrement déprimant... Tensai Family Company s'engouffre dans un pessimiste de plus en plus profond, et les personnages subissent cette ambiance sombre fataliste de plein fouet. Tomoko Ninomiya règle ses comptes avec les banques, le gouvernement japonais qu'elle accuse d'avoir été d'une incompétence notoire lors du séisme de Kobe (la publication de ce manga a commencé peu après cet événement), les entrepreneurs, bref tous ceux qu'elle considère comme responsables du triste état dans lequel se trouve le Japon qu'elle nous présente dans ce manga.
A la moitié de la série, nouveau changement. Nous entrons dans une phase, je ne vais pas dire plus orientée vers l'action, mais qui ressemble plus à une enquête, un thriller financier, un complot à déjouer ; non vraiment je ne saurais trop le définir mais vous saisissez l'idée. De nombreux éléments apparus depuis le début du manga commencent à se combiner pour se lancer dans une grande aventure où les talents de chacun seront mis à contribution. Grisant et passionnant au début, cette histoire finit par devenir jubilatoire lorsque les problèmes commencent enfin à être résolus et que les protagonistes montrent l'étendue de leurs capacités. Malgré le ton sérieux, voire parfois sombre, l'auteur arrive à conserver une partie de son humour pour créer quelques décalages séduisants, sans pour autant perdre le fil de son scénario, qu'elle mène à la perfection.
Tensai Family Company s'avère être un manga surprenant à plus d'un égard. Changeant plusieurs fois d'orientation – passant de la comédie loufoque au drame pessimiste pour finir sur une grande aventure financière – il ne se trouve pas aidé par le dessin de Tomoko Ninomiya, en lui-même agréable à l'œil (malgré une baisse de régime progressive) mais plus adapté à un josei ou un shôjo et qui risque de cataloguer d'entrée de jeu ce manga pour de nombreux lecteurs, alors qu'il s'agit d'un seinen destiné à un large public adulte. Typiquement, il s'agit d'un titre auquel il faut savoir laissé sa chance, qui plus est sur plusieurs volumes tant son contenu évolue au fil des pages. Délirant dans un premier temps, dramatique dans un second, il finit par se transformer en une œuvre palpitante au dénouement absolument jouissif tant il met en valeur les protagonistes. Un titre injustement méconnu, probablement car ses couvertures et ses premières pages ne témoignent en rien de ses qualités réelles, et car la mangaka se montre versatile quant à l'orientation qu'elle souhaite donner à son hsitoire ; il m'aura pourtant captivé au point d'enchainer les 6 pavés qui le compose.
Ninesisters

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