J'ai rien vu, rien entendu
Le nouveau long-métrage de Lucas Belvaux s'impose par sa singularité et sa force rare dans le paysage cinématographique français.Un cadre parfait et une histoire prenante, il achemine son récit par un rythme lent mais une machine parfaitement huilé. Dans le bruit et le chaos de la mécanique, erre l'âme humaine et ses remords, ses hontes et sa culpabilité. Car la première chose que fait ce film, c'est de nous interroger nous sur la nature humaine, par plusieurs questions, auxquelles il laisse de nombreuses ouvertures. La principale ambiguïté se pose sur le personnage de Pierre, a-t-il agit par sens de la justice ou par égoïsme? En voulant s'exorciser, il entraîne avec lui 37 personnes.
La loi du silence est un fléau, mais à posteriori, la condamnation des témoins semble creuse, et en cela, le comportement de Pierre vis-à-vis de la journaliste et de sa fiancée s'avère de plus en plus bornée vers la fin. Pourtant, notre empathie lui est acquise, notre sens de la justice est flattée mais Belvaux n'oublie pas de nous placer face à notre propre hypocrisie. Hypocrisie à deux niveaux: celle de ceux qui se sont tus en étant caché, mais pleurent au grand jour, et la notre qui condamnons ce comportement sans nous poser la question: qu'aurions nous fait? C'est à cette question que nous confronte le personnage du procureur, brillamment écrit. A cette réflexion de Belvaux, se rajoute un Yvan Attal bouleversant et un sens de la mise en scène exemplaire.