7h58 dans la vie des losers, who gives a shit anyway ?

Je suis ultra fan de Lumet, j'ai quasiment tous ses films en DVD, je les vois et les revois très régulièrement. Le Monsieur est un super cinéaste.


D'ordinaire, il vous prend aux tripes et ne vous lâche qu'à la fin, une fois que l'essorage 1200 tours minute de sa mécanique scénaristique vous a mis sens dessus-dessous.


Je m'attendais à la même chose avec 7h58..., malheureusement, Sidney, ou plutôt, les messieurs, dames du scénario, de la production, de la réalisation, ont oublié de respecter la règle pourtant rappelée dans Tonnerres sous les tropiques : il ne faut en aucun cas que TOUS les personnages soient totalement débiles, ni totalement losers, sinon, c'est le flop assuré. On ne s'attache à aucun d'entre eux et on se contrefout de ce qu'il peut leur arriver.


C'est exactement ce que se propose de vous offrir ce film.


L'histoire démarrait plutôt pas trop mal : des acteurs qui ont fait leurs preuves : P. Seymour Hoffman, Ethan Hawke, Albert Finney, Marisa Tomei, une histoire de braquage qui tourne mal, à la un après-midi de chien, Lumet connaît son affaire... ça va aller, cool, on va passer un bon moment.


Mais non, mais non, mais non. Rien.


Très vite, les personnages s'enlisent dans une espèce de lose dont on se sait si elle est congénitale ou acquise, laquelle va irrémédiablement faire sombrer toute la famille dans une spirale auto-destructrice.


Des losers, j'en vois partout, nous sommes entourés de leur médiocrité dégoulinante : en entreprise, en politique, dans les pages des faits divers. Ceux de cette famille ne valent pas le détour : ils sont banals, camés, cons, nuls et ont les cheveux gras.


Vous croyez vraiment que j'ai envie de me fader 2 heures de rang l'étalage de leurs vies gaspillées sous prétexte que ce sont les personnages d'un film de Lumet ? Eh bien non. Et vous non plus d'ailleurs.


On pourrait voir une approche à la : Un plan simple, ou Fargo dans ce 7h58, mais justement c'est là qu'intervient toute la nuance évoquée plus haut. Tant dans le Sam Raimi que dans le Coen, les losers nageaient parmi des personnages positifs, portés par une intrigue digne d'intérêt.


Là, non.


Pis : le montage se voudrait subtil en épousant le point de vue de chaque personnage, à la Rashomon, mais tout est trop vide dans leurs vies de minables, du coup l'effet semble artificiel et enfonce encore un peu plus le film dans des abysses de vacuité.


On s'y emmerde puissamment. Je ne prendrai pas la peine de spoiler cette rature.


Au contraire, je vous invite à ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain et à poser un oeil aussi averti que fasciné sur les chefs d'oeuvres de Sidney (Un après-midi de chien, 12 hommes en colère, Le verdict, Network, Serpico, le crime de l'Orient-Express, le sublime et méconnu The Offence que j'ai critiqué sur ce site).


Il serait erroné de passer à côté de l'immense talent du bonhomme à la vue de cette erreur dont il ne doit être que partiellement responsable, le pitoyable scénario étant signé Kelly Masterson.


"Il faut un an pour écrire un scénario", me disait un pote qui bosse dans le milieu. Celui-ci a dû être torché en beaucoup moins de temps, tellement il est bâclé. Scandaleux.

Zardu
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le 26 févr. 2018

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Fitch zardû

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