"8 Mile" est un drame américain réalisé par Curtis Hanson, sorti en 2002, et mettant en vedette Eminem, Kim Basinger, Michael Shannon, Anthony Mackie et Britanny Murphy. Le film raconte le parcours de Jimmy Smith Jr. (Eminem), un jeune homme qui rêve de percer dans le domaine du rap malgré son trac évident.
Comme pour son précédent film ("Wonder Boys"), sorti deux ans auparavant, Curtis Hanson nous propose ici un film non pas basé sur l'intrigue mais plutôt sur les personnages. Le caractère introspectif du film est d'ailleurs ce qui en fait une œuvre intéressante. En effet, l'idée est de nous monter les rêves, les peurs et les souffrances d'un jeune qui n'a pas encore tous les mots pour s'exprimer. En cela, analysant toute une palette d'émotions, le film s'avère étonnement très adulte. Il réussit également parfaitement bien à nous amener dans un univers qui n'est pas forcément apprécié de tous : le rap.
J'ai donc aimé la façon dont le réalisateur nous raconte cette histoire. Le récit est souvent d'une grande brutalité : Jimmy travaille à l'usine pour pas grand-chose ; sa mère est menacée d'expulsion ; il vit des complications amoureuses, etc. Pour autant, Curtis Hanson arrive, on ne sait trop comment, à distiller un sentiment de coolitude qui rend le long-métrage très sympathique à regarder. Autrement dit, je n'ai pas eu l'impression d'avoir à faire à un film larmoyant, bien que le sujet pouvait s'y prêter. Le réalisateur a su éviter le piège.
Ce sentiment est sans doute dû à la musique, omniprésente dans le film. Une musique qui n'est d'ailleurs pas que composée de titres d'Eminem mais aussi d'autres rappeurs comme Jay-Z ou 50 Cent. Une musique qui a également des choses à dire ... on peut notamment évoquer le titre "Lose Yourself" dont le sujet est justement un jeune rappeur, effrayé par la scène, qui se retrouve de façon inespérée sur scène et qui arrive à vaincre sa peur. Cette chanson, récompensée à juste titre par l'Oscar de la meilleure chanson originale (et pourtant il y avait "Chicago" cette année-là), est en quelque sorte une synthèse du film. Chapeau l'artiste quand on sait qu'Eminem a écrit cette chanson de manière improvisée durant le tournage.
J'aimerais également ajouter que j'ai bien apprécié le jeu des acteurs. Eminem s'avère bon acteur. La belle Kim Basinger trouve ici un rôle à la hauteur de son talent (elle avait déjà joué pour Curtis Hanson dans son chef-d’œuvre "L.A. Confidential"). C'est également un plaisir de voir le jeune Anthony Mackie dans un de ses premiers rôles. Enfin, la regrettée Britanny Murphy brille par son naturel.
Un dernier point positif est, selon moi, la manière dont le script aborde l'appropriation d'une culture, c'est-à-dire le rap. Ce genre musical dérivé du Hip-Hop est né dans les ghettos américains dans les années 1970 ... il s'agit donc d'un genre créé par les afro-américains. Quand notre protagoniste principal, ici donc incarné par Eminem, arrive sur scène, il a donc une pression supplémentaire : Jimmy est blanc. Curtis Hanson parvient à évoquer de manière très juste cet aspect de l'histoire, sans jamais tomber dans un académisme repoussant.
Pour autant, j'ai envie de conclure en disant que le film n'est pas parfait. Le schéma narratif m'a semblé trop classique et pas vraiment ambitieux. En effet, s'installe petit à petit un sentiment de lassitude car on sait très bien comment tout cela va se terminer. Il est donc regrettable qu'on ne soit pas plus surpris de ce côté-ci. J'aurais effectivement aimé ne pas tout le temps deviner l'issue de certaines scènes ...
Ma note : 7,5/10.