Contrairement à ce que sa bande-annonce laissait supposer, A Cure for Life n'est pas un ersatz de Shutter Island réalisé par un ersatz de Christopher Nolan (même si la palette de couleurs froides et certains plans semblent tout droit sortis de l'un ou de l'autre). Si le film joue avec nos nerfs dans sa première moitié en effet, on se pose assez peu la question de la folie de Lockhart, puisque son point de vue est complètement épousé par la caméra (même si, à intervalles réguliers, le film tente de ré-introduire une ambiguïté à ce sujet) et la menace vient donc résolument de l'extérieur, à savoir de ce glaçant sanatorium où le personnel semble névrosé et interchangeable (toutes les femmes sont blondes et fines, tous les hommes sont bruns et carrés), à l'exception de deux ou trois "gueules" (le premier médecin, l'homme à tout faire/ fossoyeur et, bien évidemment, le directeur) dont l'importance narrative se lit ainsi sur leur visage.
Si le remède est finalement assez plaisant, grâce à une distribution réussie (avec une mention spéciale pour Jason Isaacs), une très bonne utilisation des décors (la scène des bains turcs), un montage assez efficace (mais qu'y a-t-il donc dans ta chasse d'eau mon bon Lockhart?) et quelques séquences anxiogènes et dérangeantes à souhait (la première étape de la "cure" dans le réservoir pour Lockhart, la scène de la piscine pour Hannah), le film ne parvient pas à dépasser le statut d'honnête divertissement en proposant quelque chose de véritablement original et entièrement maîtrisé. Là où un Del Toro, un Nolan ou un Bayona auraient réussi à lier toutes les pistes scénaristiques ensemble, Verbinski s'égare entre la réécriture de Dracula à notre époque capitaliste, le film d'atmosphère dans l'asile de fous et l'hommage aux monstres de la Hammer (notamment présent lors du final du film), avec parfois des difficultés à négocier les virages en évitant les clichés. Un peu à l'image de son héros,


Verbinski semble peu à peu se complaire dans la "cure" et nous contraindre à avaler non des anguilles mais des couleuvres ("Why would anyone want to leave?") avant de se reprendre et de boucler son histoire dans un final assez attendu.


PS: que les gens qui ont peur des dentistes s'abstiennent de voir ce film. À moins qu'ils ne désirent une thérapie de choc, que dis-je? Une cure...

Ruhenheim
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le 19 févr. 2017

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