Ce n'est ni l'indigence d'un scénario tout ce qu'il y a de plus banal, ni l'extrême platitude des quelques rares répliques proférées par des acteurs sous-exploités ni même l'inconsistance de personnages pour la plupart aussi creux qu'une coquille de noix qui occulteront l'essentiel du sixième long métrage de Terrence Malick : comprendre A la Merveille non pas comme un bon film mais comme un ravissement cinématographique. Une splendeur pour les sens. Une oeuvre belle, moderne et plastiquement très aboutie.


A la Merveille parle évidemment d'amour et de lumière, souvent sur le mode d'une écriture à l'emporte-pièce multipliant les lieux communs. On a beaucoup décrié cette banalité inhérente aux dialogues, de la même façon que l'on a reproché au cinéaste l'incohérence de sa narration délibérément éclatée, voire déconstruite. Je préfère pour ma part y voir une merveilleuse audace, une épure au profit des images, du montage et de la pure beauté formelle. A la Merveille, au gré de cadrages tous plus inventifs les uns que les autres, ne cherche en aucune façon à rassurer son public, privilégiant les vraies émotions et la simplicité : son authentique beauté, au delà de l'esthétique en elle-même, opère via une direction d'acteurs frayant une modernité salutaire ; principalement improvisée à partir de nombreuses versions d'un récit pour le moins sommaire la mise en scène de A la Merveille parie sur l'ingénuité préalable de ses quatre acteurs principaux : il en résulte une oeuvre vertigineuse, habilement montée, éclairée jusqu'à une savoureuse sublimation.


Enrobé d'une bande originale somptueuse reprenant entre autres le répertoire classique et le magnifique thème principal de L'Ours de Jean-Jacques Annaud le long métrage de Terrence Malick utilise à nouveau le procédé narratif de la voix-off, avec audace et virtuosité : conférant une incontestable fluidité à l'ensemble, cette narration à la fois laconique et systématique ( pour ne pas dire répétitive ) s'amalgame parfaitement aux bouleversements chronologiques des différentes séquences. Capable de sublimer aussi bien le Mont Saint-Michel que les rayons d'un supermarché Malick signe là son film le plus radical, et sûrement l'un des plus stimulants cinématographiquement. A revoir absolument !

stebbins
9
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le 14 avr. 2021

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