Onze ans après sa sortie, il fallait bien que je voie enfin la fameuse director's cut d'Alien 3. Là où la plupart des DC et autres versions longues ne font que rallonger un peu le film en approfondissant les relations entre les personnages, celle-ci donne lieu à une nouvelle oeuvre. Dense, personnelle et anti-manichéenne, la version de 2003, du haut de ses 2h30, est largement supérieure à l'originale.

Je déplorais, à propos de la version cinéma de 1992, l'absence de réelle profondeur qui réduisait Alien 3 à un bon film de monstre. De même, on pouvait croire que le but de Fincher était de retourner à la dynamique du premier opus, c'est à dire faire peur avec un alien au singulier et des victimes sous-équipées, but manqué car la créature est maintenant bien connue et montrée sous toutes ses formes. En réalité, la version longue nous montre que l'alien n'est pour le réalisateur qu'un prétexte pour développer ses personnages et étudier leur comportement. Tout comme James Cameron et Jean-Pierre Jeunet, David Fincher a enfin droit à son oeuvre, ses variations sur le thème imposé par Ridley Scott. Pas d'angoisse, pas de gros flingues, ici Fincher s'amuse à détourner les codes chrétiens du cinéma : les héros sont la lie de l'humanité (violeurs, assassins et fous dangereux) et la femme pure et sans faille non seulement apporte le Mal mais s'abaisse aux pulsions physiques. Sans parler évidemment de la figure christique finale joliment pervertie. De plus, le film propose une belle métaphore de l'Enfer, à travers cette prison bâtie sur les flammes d'une fonderie et où atterrit le dragon, le Diable qui dévore les pêcheurs.

Toutes ces réflexions, un film de 2h arrangé par les producteurs ne pouvait que les effleurer. Les monteurs de Fincher ont véritablement rendu justice à leur réalisateur : Alien 3 est un film riche et savoureux, noir et amer, où l'on se délecte de chaque parcelle de décor et de chaque note de musique. Et la cerise sur ce gâteau aux tons ocres étouffants : la scène où Ripley traque le xénomorphe et croit le reconnaître dans un tas de tuyaux, magnifique hommage au travail de HR Giger. Fans de la saga, n'hésitez pas à poser les yeux sur cette director's cut. C'est un vrai délice.

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le 18 nov. 2011

Modifiée

le 28 avr. 2014

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dauphin_discret

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