Luc Besson. Un réalisateur qui a toujours polarisé les avis et critiques. Je suis de ceux qui défendent sa première partie de carrière (80/90) mais qui est plus sceptique (voire totalement hermétique) quant à ses livraisons depuis les années 2000. Depuis qu'il "s'auto-produit" sous son propre étendard "EuropaCorp" en fait.
Besson, au début de sa carrière, avait pour habitude de dire qu'il ne ferait "que 10 films". Il aurait peut-être dû en fait, tant on sent un manque d'inspiration flagrant dans ces derniers films, où il recycle ses propres formules. Point culminant de ce recyclage en règle, ce "Anna" n'est ni plus ni moins qu'une sorte de remake de son "Nikita" d'il y a 30 ans.
Pire ; Besson voyant bien les risques pour sa carrière que représenterait un nouvel échec (EuropaCorp est en sursis), il décide de se réfugier à l'époque où il maîtrisait le mieux son sujet. Ainsi "Anna" se déroule (en va et vient) dans une période calée entre 1985 et 1990. Sans réelle justification d'ailleurs (hormis la flemme de transposer le conflit CIA/KGB à nous jours?). Du coup on ne comprend pas trop cette contrainte qui amène des TONNES d'erreurs anachroniques, que ce soit au niveau de la mode mais surtout sur le plan technologique (ordinateurs récents, clés USB alors que l'USB n'existait même pas...). Ce ne sont certes que des "détails" mais qui ne font que mettre en avant un manque de rigueur qui se ressent sur l'ensemble du travail.
Pour seules nouveautés, il nous sert une formation d'espionne russe qui s'avère ensuite jouer les agents doubles ("Red Sparrow" est déjà passé par là, en 10 fois mieux hélas) et il découpe son récit en d'innombrables flashbacks pour essayer de faire croire à une sophistication complexe.
Si cette sophistication apparaît bien légère, on pourra quand même apprécier ce mécanisme qui, soyons honnête, fonctionne plutôt bien et amène un soupçon d'originalité dans le genre. Hélas son portrait de la femme fatale est toujours le même depuis des décennies, et le regard qu'il porte sur elle est assez gênant maintenant (toujours ce besoin de sexualiser à outrance ces femmes pourtant "fortes"). Pire encore
son héroïne qui tombe forcément "amoureuse" des 2 agents opposés, les 2 représentant une figure tutélaire d'un père qui lui manque. Au secours!!
Finalement la seule bonne surprise du film est de voir revenir Besson à une réalisation propre et efficace, celle qu'on lui connaissait auparavant. Moins de VFX douteux (comme dans l’infâme "Lucy") et des gunfights soignés. En cela il peut remercier le merveilleux Alain Figlarz, le coordinateur et chorégraphe des cascades qui fait encore une fois un boulot de dingue qui crédibilise la cascade française dans le monde entier. Car c'est aussi ça le cinéma de Besson... Qui d'autres aujourd'hui pour avoir l'ambition internationale et le goût du Genre, et pour faire travailler tant d'équipes françaises avec lui?
Je ne vais pas cracher totalement sur ce film, finalement propre et efficace en terme de réalisation, ce qui n'était pas forcément le cas des derniers films... Mais il n'amène rien au genre et se veut plus malin qu'il ne l'est vraiment. Besson devrait peut-être se mettre au service d'autres scénaristes désormais, car c'est là qu'il fait désormais sérieusement défaut.