Quand les années de plomb te reviennent dans la gueule

Après la guerre est librement inspiré d'un fait historique récent : à savoir qu'en 1985, Mitterrand accorda l'asile politique aux combattants des Brigades Rouges et autres groupes armés gauchistes italiens, à condition que ceux-ci déposent les armes. En 2004, toutefois, Perben, alors garde des sceaux de Chirac, revint sur la décision de 1985 et se mit en tête d'extrader les repentis italiens. Cette affaire connut un certain retentissement à l'époque, notamment en raison du cas de Cesare Battisti, devenu auteur de romans policiers à Paris, qui dut repasser dans la clandestinité et fuir au Brésil afin d'échapper à l'extradition vers l'Italie, en vue d'y purger une peine de prison à perpétuité.


Et si Marco Lamberti, le protagoniste principal du film, à Paris, se retrouve - lorsque ça commence - à peu près dans la situation de Cesare Battisti, la comparaison s'arrête là grosso modo. Après la guerre n'est pas un biopic de Cesare Battisti. Ce n'est pas non plus un film politique, puisque le spectateur comprend très vite que sa réalisatrice a décidé d'adopter une parfaite neutralité à ce sujet, se contentant de faire le constat d'une guerre passée. Non, il s'agit bien plus d'un film intimiste, qui va nous montrer les conséquences de cette décision d'extradition sur les proches de Marco Lamberti : sa fille, qui vit avec lui en France, et le reste de sa famille, restée en Italie, d'avec qui il a coupé les ponts. Conséquences qui s'avéreront, on s'en doute un peu, dévastatrices.


Le parti pris de neutralité du film se traduit par une grande sobriété cinématographique. Pas de pathos, quasiment pas de musique, des dialogues simples souvent entrecoupés de longs silences. Ca aurait pu donner un film ennuyeux, mais fort heureusement, les acteurs sont bons et la maitrise technique de la réalisatrice fait le reste. Ca donne en définitive un film - tourné à Bologne et dans les Landes - peut-être un peu académique, certainement pas gai, mais d'une indéniable qualité. Qui plutôt qu' "Après la guerre" aurait s'appeler "Longtemps après la guerre". Une saloperie de guerre dont finalement les stigmates peuvent encore se manifester 20 ans après sa fin : mais n'est-ce pas toujours le cas ?

Marcus31
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le 25 mars 2018

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