Critiques assassines

Après une adaptation de la saga de jeu vidéo Warcraft mitigée et moult autres adaptations en général totalement foirées (Prince of Persia, Doom, Hitman, Max Payne, Alone in the Dark etc... Le seul qui peut être sauvé est le Silent Hill de Christophe Gans), Ubisoft tente le diable en proposant leur film dérivé de la célèbre franchise Assassin's Creed.
Entre 150 et 200 millions de dollars de budget, un casting 5 étoiles, un réalisateur prometteur, l'éditeur a mit les bouchées double pour lancer leur univers cinématographique dans le milieu si propice à l'échec qu'est Hollywood.
Cette production nous mettait clairement en confiance, avec une volonté de respecter l'univers du jeu vidéo tout en offrant au spectateur lambda un spectacle compréhensible et une envie de ne pas céder au tout-numérique inhérent à notre époque.
Alors qu'elle ne fut pas ma surprise quand apparurent sur le net les premières critiques en majorité négatives. Assassiné, le film est une daube pour la presse : un mauvais film, tout comme ils l'annonçaient pour Warcraft.
M'armant de courage et restant campé sur mes espoirs d'un film au moins correct pour enfin lancer les adaptations de jeux vidéo au cinéma, je me suis lancé dans ma salle de cinéma au plus vite.

Le film commence durant l'Inquisition espagnole du 15ème siècle (période que je ne connais pas vraiment je vous avoue) et nous offre une introduction sympathique des Assassins et de leur univers. En gros, depuis des siècles a lieu une lutte acharnée entre les Templier, prônant une paix basée sur l'ordre et le contrôle des populations, et les Assassins qui préfèrent une liberté totale. Les deux camps recherchent la pomme d'Eden qui leur permettre de... et bien de gagner la bataille on va dire. Parce qu'en effet, les enjeux ne sont pas clairement établis quant à la nature de cette pomme d'Eden. Quelques explications sont fournies mais je n'en parlerais pas car c'est assez flou et parce que j'ai la flemme.

Puis on nous ramène dans dans l'époque moderne, où un gamin qui aime le VTT parce que c'est un rebelle voit sa mère se faire tuer par son père pour des raisons mystérieuses. 20 ans plus tard, alors qu'il est arrêté pour meurtre et condamné à mort, il est "capturé" par la société Abstergo qui appartient aux Templiers. Grâce à lui et à son passé, ils vont rechercher la pomme d'Eden, chacun pour ses propres raisons.

Alors. Premièrement, le film mérite-t-il son statut de daube absolue (37/100 sur Metacritic, même Suicide Squad faisait mieux) ? Soyons clairs d’emblée, non. Il se paye même le luxe d'être un divertissement assez médiocre mais très regardable. Alors de là à croire que la critique prend un malin plaisir à détruire, écraser, humilier toute adaptation de jeu vidéo lui passant sous la main, il n'y a qu'un pas.
En effet, au niveau de la mise en scène pure, on est à un niveau très correct. Justin Kurzel qui nous avait offert le très bon et visuellement sublimissime Macbeth montre son talent de metteur en scène. Même s'il y a des défauts comme un montage parfois peu lisible, la photographie est magnifique, particulièrement dans les scènes du passé et l'utilisation de nombreux décors réels est visible et impressionnent. Tout comme les cascades en tout genre des assassins encore plus mobiles que dans les jeux vidéo.

Les défauts du film proviennent principalement du scénario et de son écriture. Ainsi, on nous balance entre le présent et le passé constamment et cela se ressent vraiment sur l'écriture des personnages.
Premièrement, ceux du passé n'ont aucun background, peu de dialogue (en espagnol d'ailleurs, bonne initiative) et donc aucune consistance.
Ensuite, les personnages du présent qui ont droit à plus de présence à l'écran et à plus de développement sont malheureusement désespérément creux et vides. De vrais coquilles vides. Michael Fassbender a l'air de sobrement se faire chier tout le long du film, Marion Cotillard fait du Taliah Al Gul en un peu plus fragile, Jeremy Irons n'a pas un mouvement de faciès du film, et les autres acteurs sont si peu présents que je pense avoir le droit de dire qu'on en a rien à foutre. Tout de même, on peut saluer la présence à l'écran des français Denis Ménochet (Inglorious Batards) et Ariane Labed (The Lobster récemment). La distribution joue juste, mais ne révèle jamais de fulgurance en terme d'acting ou une quelconque ambition.
Et si il n'y avait que le casting, mais non, l'univers est relativement bien exploité mais on le sent difficile à expliquer en un film pour les non-initiés qui passeront probablement à côté de l'intérêt thématique du film. De même certains personnages ont des réactions absurdes et des changements de comportement vraiment mal amenés (vous comprendrez au visionnage).
Enfin, je sais bien qu'Ubisoft veut prospérer et lancer une trilogie, mais la manière de laisser un vide béant à la fin du film est assez malvenue selon moi. Un peu comme le dernier Warcraft.

Pour conclure, on a donc droit à un divertissement généreux sur la forme, mais assez mauvais sur le fond. Les fans hardcore apprécieront, quand les novices se sentiront un peu laissés sur la touche au profit des connaisseurs. Néanmoins, le résultat mitigé ne retire pas à Justin Kurzel le titre de réalisateur à suivre pour son talent visuel et de mise en scène. Les critiques ont assassiné le film à une ampleur beaucoup trop importante et cela risque de lui porter préjudice au box-office. Et cela ne peut pas être bon pour le futur des adaptations vidéoludiques.

Ps : La musique est parfois hors-propos, notamment au début. Pourquoi ne pas avoir repris le magnifique thème du deuxième volet bon dieu.