L’infini aux multiples visages

Après l’excellent 21 Grammes et l’impressionnant Birdman, Babel et le troisième film que je visionne d’Alejandro González Inárritu. Soyons honnête tout de suite, cette œuvre est certainement la moins abouti des trois films cités. Cependant, Babel (magnifique titre au passage) a de beaux arguments à faire valoir.


Tout d’abords, Babel aborde un nombre thèmes incroyables sans que cela ne crée une surcharge dans le récit ou que cela soit convenu. Bien entendu le thème de la famille du passage délicat de l’adolescence à l’âge adulte ou de la sexualité est central dans le récit. Cependant le nombre de sous thème est bien plus riche qu’il n’y paraît.


On a donc la paranoïa post 11 Septembre avec l’arrestation à la frontière de Santiago et sa tante alors qu’il ramène des enfants dont ils ont la garde à leur domicile à San Diego ou encore l’exemple des médias qui qualifient l’attaque du bus comme terroriste sans aucune preuve. La jalousie est également abordé avec les deux frères Ahmed et Yussef car l’aînée jalouse secrètement son cadet plus impétueux, mature et courageux que lui et qui fini par perdre la place de grand frère et de mentor pour son jeune frère.


On retrouve également ce péché capital chez le personnage de Chieko, jeune femme encore vierge et sourde muette qui espère être aimé un jour et tente désespérément de coucher avec un homme quelques soit la méthode employé. Ce sentiment d’être mal aimer s’accouple parfois avec la jalousie notamment dans cette scène magnifiquement réalisé en boîte de nuit ou c’est finalement sa meilleure amie qui sera le coup d’un soir par un garçon qu’elle connaît à peine.


Enfin, on peut également citer le thème du choc culture et plus précisément de la culture dit « dominante » (la culture occidentale) qui doit s’adapter à la « sous culture » représenté par la culture orientale pour Brad Pitt et par la culture Mexicaine pour ses enfants. En effet comme on peut le voir si la « sous culture » s’acclimate parfaitement de la culture « dominante » car elle en a intégré les codes. Il est cependant bien plus difficile pour la culture « dominante » de s’adapter à une autre culture car elle ne la connait pas ou peu persuader que sa culture est la meilleur et la plus standardisé.


Cela se traduit par des enfants traumatisés de voir un poulet se faire égorger devant leurs yeux ou de voir des touristes américains protester contre la chaleur alors que les habitants natif du village subissent cette aridité depuis toujours sans se plaindre. Le réalisateur montre également que deux cultures sont à la fois proches en distance (Etats-Unis/Mexique) mais également distant (la frontière gardé par la douane).


Au niveau des acteurs, je constate à mon grand étonnement que le tout reste assez hétérogène ce qui est surprenant venant d’un drame choral. On a d’un côté la prestation de Rinko Kikuchi en dent de scie qui en fait parfois un peu trop alors que de l’autre côté, on a Gael García Bernal exceptionnel qui campe un personnage impulsive mais d’une grande humanité. Dans l’ensemble, les acteurs sont très convaincants.


La réalisation est quant à elle d’excellente facture comme toujours avec Alejandro González Inárritu. L’exploit du réalisateur étant de filmer de la même manière l’immensité d’un désert que l’immensité d’une mégalopole Japonaise. Un tour de force impressionnant. D’ailleurs, le réalisateur n’hésite pas à prendre une pause dans son histoire pour filmer le décor environnant ou vive les protagonistes. Le temps est alors suspendu pendant quelques secondes. On se dit que tout est possible et qu’on peut faire machine arrière pour aider les personnages du film à prendre les bonnes décisions.


Cependant c’est bien la que le bât blesse, car le gros défaut de Babel et l’accumulation de mauvais choix des personnages. Cette accumulation fini par agacer l’histoire semble parfois peu plausible ce qui rends le spectateur parfois distant avec les personnages. Certes le réalisateur parvient très souvent à éviter le pathos, mais on a connu le Mexicain plus subtil dans 21 Grammes. Léger regret également pour la quasi absence de déstructuration du récit, qui apportait un plus émotionnel non négligeable et qui permettait de s’attacher davantage aux personnages.


Enfin j’aimerai parler de ce plan de fin magnifique qui explique tant de chose à propos du film. Ce plan qui traduit une nouvelle fois l’immensité, montre qu’en dépit des différences culturelles ou des différences de richesses, les tragédies n’incombent pas qu’aux personnes qu’on nous montre. Chaque personne tente de réussir à traverser le chemin de la vie qui est semé d’embûche.


Ainsi des histoires tel que Babel, il y’en a tout les jours dans divers endroit du globe terrestre. Ses diverses histoires se répéteront toujours à l’infini au quatre coin du monde. L’ensemble de ses histoires représente un monde infini aux multiples visages.

KS-1695

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