Un film de cinéma c'est certain. Du divertissement intelligemment pensé. Il ne fera pas l'unanimité. La raison principale ? Le son diégétique. Le son du film se veut le plus lié possible à ce que perçoit le héros, un jeune atteint d'acouphènes qui écoute constamment de la musique pour les masquer. Pas une seconde de silence. Le sound design est travaillé à merveille. Mais l'omniprésence de la musique est vouée à fatiguer le spectateur. Edgar Wright le sait très bien. Il touche juste et fait vivre une complète expérience de cinéma. Le spectateur est presque acteur du film, il en ressort presque aussi éreinté que le personnage principal.


Le réalisateur nous propose une histoire très complète, et conventionnelle, jamais surchargée ou trop explicite. Un jeune chauffeur pour braqueurs tente de sortir de ce milieu dangereux et néfaste pour se ranger du bon côté et vivre pleinement son amour avec la jolie demoiselle dont il vient de tomber amoureux. Le schéma narratif est connu mais fonctionne bien. L'empathie avec le héros se fait très vite - et se défait quelques fois un peu. Dans la vie tout n'est pas noir ou blanc. Le gentil peut tuer, le gentil peut casser son code d'honneur, le gentil peut avoir voler ses seules répliques badass à des films Pixar.


Autre raison qui fait que ce film fonctionne : l'humour. Jamais en trop. On sent que les vannes ne sont pas là parce qu'elles étaient sur le carnet du dialoguiste et qu'il fallait les caser. Elles arrivent au bon moment et apportent une valeur ajoutée au long métrage. D'autant que certaines situations se suffisent à elles-mêmes pour être drôle ou de simples décalages entre le son et l'image.


Les personnages pourraient venir des films des frères Coen. Des clichés de films de genre. Et comme pour le duo de cinéaste Wright se joue des clichés des héros déjà clichés. Fast and Furious, James Bond, Drive, True Romance, Reservoir Dogs ... Les films de bagnoles et les héros de pop culture ont très bien été digérés par le réalisateur. Qui mêle aussi des références aux jeux vidéos, à la bande dessinée etc. Ces clichés et ces références sont parfaitement assimilés : une fois dans cet univers décalé, ils ne font ni tâche, ni facilité.
Au centre de Baby Driver il y a un acteur remarquable : Ansel Elgort. Connu à l'origine grâce à Nos étoiles contraires Ansel Elgort montre ici l'étendue de ses talents. Tour à tour sincère dans son jeu puis se jouant de pastiches il arrive à donner une superbe crédibilité au personnage et une force au film.


Edgar Wright signe une ode pop à l'amour. En guise de film, un phénoménal Juke Box accompagné d'images très travaillées, de mouvements de caméra beaux et complexes, d'un excellent montage et de superbes effets.
Déjà les cascades sont chorégraphiées de façon très précises et la mise en scène sait en tirer parti à la fois pour faire rire mais aussi et surtout pour pousser le spectateur à vivre des émotions fortes. Toute l'action fait vraie. C'est essentiel. Mais que ce soit les cascades, les meurtres : on y croit. D'autant qu'il paraît que l'acteur principal a réalisé lui même les figures en voiture (ce qui n'enlève rien au film, au contraire).


Baby, le héros, qui porte se long métrage est un grand idéaliste. Il a des playlists en fonction de ses humeurs. Il vit sa vie comme un film. Il enregistre même les conversations qu'il entend et les remix. Baby est le propre réalisateur de sa vie. Est-ce que Baby ne serait-il-pas un peu madame Bovary (au pays des gangsters casse-cou) ?


Le film est peut-être moins expérimental que les précédentes œuvres d'Edgard Wright. Néanmoins il fourmille de belles idées de mise en scène et d'une trentaine de musiques connues bien exploitées. Un action-opera avec une douce histoire d'amour idéal sur fond de musique rythmées, et à quatre-vingts cinq décibels, on en redemanderait presque, mais pas tous les jours (et au vu des résultats du box office : peut-être une suite). C'est possiblement aussi un film très appréciable parce qu'Edgar Wright tente des choses, expérimente, sans trop se tromper en plus, mais aussi parce que cela rend le film différents des autres, surtout au vu de ce script assez attendu. Alors il faut espérer que ce type de film et de mise en scène restent une touche propre au réalisateur et que ce ne soit pas copié et décliné par tout un tas de franchises.

Echaper
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le 12 juil. 2017

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