Il serait injuste de condamner un film qui, malgré une naissance repoussée et remaniée, possède ses vilaines qualités et ses vilains défauts. Mais n’est-ce pas là toute l’essence de cette franchise qui sort sans doute un peu tard des oubliettes ? Pas forcément. En comptant le fantôme de Joe Carnahan (“Le Territoire des Loups”) au scénario, les choix de mise en scène des belges, Adil El Arbi et Bilall Fallah, rafraîchit un peu un univers entre deux générations. Ils l’ont déjà fait d’une certaine manière avec “Balck” et le récent “Gangsta”, mais ici, le pitch interculturel est au niveau cinématographique. On ressent un doux hommage à Michael Bay, mais on désire pyrotechnique et sa caméra à l'épaule nerveuse sont exploités avec plus de souplesse. Il en ressort un film toujours dynamique, mais qui resserre bien quelques plans dans des angles assez surprenants, accompagnés d’une colorimétrie bien distincte. Cependant, le film pêche sur son décalage comique et son canon rouillé, n’arrivant plus à assumer le côté “Bad Boys” de la chose.


Pourtant, nous en sommes là, avec un Mike Lowrey (Will Smith) plus ou moins dans le coup et un Marcus Burnett (Martin Lawrence) qui a déjà tiré sa révérence. Et dans cet élan d’opposition, il manque du développement, notamment sur le fait de vieillir et de ce que la retraite véhicule sur les performances physiques. Ce n’est pas non plus totalement absent, mais c’est soit grossier, soit incohérent, vis-à-vis des aspirations des personnages. On se rabat alors sur de l’action brute, toujours dans l’esprit contradiction et ce syndrome de Peter Pan. On se repose davantage sur des situations comiques dignes de Laurel et Hardy qu’à des flics qui se permettent d’imposer leur morale old school. Mais le martyr de ce projet, c’est bien Marcus, qui a déjà franchi un cap et une frontière dont il est difficile de faire marche arrière. C’est à ce moment que sa présence est remise en question, car il sert inévitablement un Mike, de nouveau en pleine ascension.


Mais outre cette observation alarmante, c’est un esprit faiblard qui frappe même au cœur de la devise chantée de ce duo. L’installation d’une équipe plus jeune et plus moderne est si exagérée qu’on en perd le premier degré à l’égard du buddy-movie. En plein revirement, on se rend rapidement compte que le récit tourne en rond afin d'expérimenter et de nous servir du spectacle, souvent sans pertinence, mais qui toutefois est maîtrisé. Or, ce n’est pas une succession de sketches qui sauvera le film, mais bien un film. En posant les antagonistes, on revient à des bases fondamentales de la nostalgie et le film ressemble presque à un mauvais remake qu’à une suite en bonne et due forme. Le fait de ne pas trancher en faveur du côté déjanté ou reposé est une chose, mais manquer le crochet sur l’émotion et la portée dramatique en est une autre. Ce film semble s'être perdu dans une époque qui ne lui sied guère et qui se neutralise par son propre discours de passation, qui n’en est finalement pas vraiment une.


“Bad Boys For Life” souffre ainsi de son propre parcours, miné par un Michael Bay, dont on ne peut lui reprocher de faire évoluer ses personnages au milieu d’effets visuels, car cela fonctionne en un sens. La réalisation des belges a quelque peu adoucit le concept, car ils sont très sages pour ne pas dire scolaires sur les bords. Leur maladresse peut se lire en la personne de Marcus, qui n’arrive plus à insuffler de la vie dans sa famille, car il trône en tant qu’un esprit, contrairement aux muscles trop vieux de Mike et son addiction pour l'adrénaline. Malgré tout, le scénario peut nous maintenir éveillés, le temps d’une balade souvent étirée, mais qui promet quelques bonnes surprises, sans pour autant rectifier l’irréparable.

Cinememories
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le 21 févr. 2020

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