Par Guillaume Loison

De Bad lieutenant, l'original, Werner Herzog ne garde même pas le squelette. Tout au plus quelques lignes : la toxicomanie d'un flic ripou, la toile de fond obsédante de paris qui dégénèrent. Plutôt qu'un remake, un autre film, donc, tout neuf, sans filiation catho - Werner n'aurait jamais vu le film de Ferrara - qui, comble du sacrilège, délaisse New York pour la Nouvelle Orléans. Dépaysement total que cette escale dans les moiteurs tropicales de la Louisiane : des crocos sortent des marécages, un serpent se love entre les barreaux d'une prison engloutie par Katrina, où un flic retord se pète le dos alors qu'il sauve un détenu des eaux. Un lumbago plus grave que prévu, puisque point de départ du film : pour accélérer la guérison, le flic triple sa posologie, vire junkie, puis pourri intégral. En parallèle, une enquête irrésumable, à la Chandler, accompagne sa décadence.

C'est surtout le tempo qui compte, vaste divagation entre complainte bluesy et trip ironique, aiguillée par les shoots de Nicolas Cage et ses picotements de dos. Un film tout en courbes, archi malin, qui opte pour le contre-pied permanent : on passe in extremis par le jardin du voisin pour coffrer un malfrat véreux (qui conduira au malfrat principal), on perd de vue un témoin clé en cinq secondes, volatilisé à Londres trois plans plus tard. Même la mise en scène, parfois, s'écarte des tables de lois du polar à la première personne, s'éloignant des basques de Nicolas Cage pour coller à l'oeil d'un alligator traversant une autoroute. Non content d'avoir trouvé une structure toute neuve, le film y gagne forcément en densité. L'espace, confiné à trois ou quatre points cardinaux de la ville (hôtel de passes, commissariat, quartier criminel, que Cage relie inlassablement dans tous les sens), s'en trouve enrichi à chaque visite. Nouvelle pièce, nouvel enjeu, le film ouvre de nouvelles brèches, les explore en direct (la recherche du témoin dans un bar-casino labyrinthique). (...)

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Chro
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le 14 avr. 2014

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