Barton Fink me conforte dans l'idée que les Coen sont de grands cinéastes, capables de réaliser des films d'une grande richesse. La mise en scène y est admirable non pas seulement grâce aux cadrages ou divers mouvements de caméra qui restent en règle générale très bien pensés mais aussi grâce à la manière de balayer l'espace, de le peindre, de la délimiter et avec la symbolique qui en découle. La majeure partie de l'intrigue a lieu dans cet hôtel miteux, glacial, froid qui semblerait presque hanté et qui n'est pas sans rappeler l'hôtel Overlook de Shining. Comme dans le Kubrick ou la Zone dans Stalker, l'hôtel semble presque tenir ici un rôle principale. Cet endroit inquiétant donnera naissance à des craintes, des angoisses, des fantasmes chez Barton Fink, le personnage principal. Celui-ci est brillant de par son écriture et son interprétation. Ecrivain incompris en proie au doute et à la peur de la page blanche face à l'écriture contrainte d'un scénario sur un thème qu'il ne connait pas et qui ne le passionne pas. Turturro excelle dans ce rôle peu facile, ce personnage timide et réservé quand il découvre, dynamique et excentrique quand il sait de quoi il parle. La qualité des personnages est un gros point fort du film, John Goodman est génial aussi dans ce rôle très énigmatique. Mais qui est cet étrange voisin? Un honnête homme? Un meurtrier? Un démon? Une illusion? Il reste une présence à la fois réconfortante et inquiétante pour Barton Fink. A noter aussi la présence du non moins excellent Tony Shalhoub en producteur névrosé.

Le scénario est également d'une grande finesse. Les Coen partent légèrement dans l'exagération mais ça ne donne que du crédit en faveur de la critique de Hollywood qui découle du film, Hollywood qui est toujours dans l'exagération et dans la recherche du profit financier en dépit de la véritable création artistique. Le film prend des allures de cauchemar éveillé, la dernière séquence de l'hôtel est d'ailleurs aussi hallucinante que brillante, on plonge une fois dans plus dans un univers onirique et inquiétant. Et la toute dernière scène du film tout aussi belle que symbolique ne fait que conforter cette idée de rêves, de fantasmes qui habitent le personnage principal en pleine chute mentale.
C'est un film intelligent qui mérite un second visionnage pour en discerner toutes les richesses et subtilités. Un Coen majeur.
Moorhuhn
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le 10 sept. 2012

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