Alors, comment te dire ? Je surkiffe les superhéros, la race de sa grand-mère. Oui je suis majeur depuis un moment, oui mon unique obsession devrait être de réussir dans la vie, oui mon tropisme principal devrait être les nénés des nanas mais, mon vieux, mets moi un type en collant sur un écran ou sur une page de comics et je suis ton bonhomme, je te fais la total pour un prix défiant toute concurrence. J'y peux rien. Je vais même pas rentrer dans les considérations philosophico-psychologiques comme quoi les superhéros forment la mythologie d'aujourd'hui, qu'ils sont les dieux d'un monde déchristianisé et patati et patata. Je laisse Usul faire une vidéo dessus. Pour la branlette, j'utilise encore ma bite #conservateur. Simplement, j'aime ça, j'aime la castagne, j'aime les valeurs d'héroïsme, de dépassement de soi, j'aime les identités secrètes, j'aime les némésis, j'aime un peu tout ce qui gravite autour de ces univers. Et je suis pas non plus partisan d'un camp ou d'un autre : que ce soit Marvel ou DC, si c'est bon je prends.


Ainsi, quand a été annoncé ce Batman v Superman, j'ai senti une belle petite érection grimper le long de ma jambe (oui, oui, de ma jambe ;) ) que même la plus bonne de tes copines bonnes pourrait pas m'inspirer. J'ai même pas été si triste que le costume de Batman change de locataire. J'avais adoré la trilogie de Nolan, que la page se tourne ne me semblait pas scandaleux. En plus, Ben Affleck j'ai envie de dire "pourquoi pas ?" J'ai même pas eu un frisson d'angoisse en voyant que ça allait être Snyder derrière la caméra, alors que Snyder, pour moi, c'est le Bigard des réal'. C'est dégueulasse, putassier, vulgaire, dépourvu de style et de goût mais c'est foutu suffisamment convenablement pour que tu lui souhaites pas la mort. Ou en tout cas pas une mort douloureuse. Même le Man of Steel débile à souhait, artistiquement hideux et gavé de FX m'avait pas mis la puce à l'oreille sur ce qu'allait être fatalement ce BvS.


C'est donc avec la bave aux lèvres que je me suis rendu dans mon cinéma favori pour voir se bastonner deux légendes de la culture comics. Et figurez-vous que les premières minutes sont plutôt pas mal ! La genèse de Bruce Wayne est expédiée plutôt subtilement, on retrouve des personnages connus, on a une scène avec Amy Adams dans le désert en mode Aymeric Caron rousse plutôt classe et on se dit qu'on est parti pour deux bonnes heures de franche rigolade.


Et puis non, pas du tout. Tu t'en doutes bien, sinon j'aurais pas mis 5. Je suis pas comme ces connards qui mettent des 0 et qui disent : "J'ai mis zéro pour qu'on voit ma critique mais en vrai ce truc vaut dix." Toi tu mérites un poing dans la gueule et il va t'arriver en mode authentique, tu vas pas le confondre avec une caresse poto. Non, Batman v Superman, en fait, c'est hyper moyen. C'est pas, comme on a pu le lire et l'entendre, le pire film de superhéros de tous les temps, ni tout à fait une merde comme l'histoire, semble-t-il, va se souvenir de ce machin, mais c'est quand même hyper moyen.


Si vous le voulez bien, commençons tout de même par les qualités du film, parce qu'il en a. Déjà parce que ça va être plus court et puis parce que les qualités étaient suffisamment prometteuses pour regretter qu'elles soient gâchées par le reste. Déjà il y a Affleck en Batman. C'est approuvé par ici. L'amant de Matt Damon est charismatique, mastoc comme on aime et suffisamment taciturne pour bien qu'on se rende compte que perdre ses deux parents devant ses yeux, ça peut te donner envie de te balader en slip kevlar. Alors oui son background est merdiquement expliqué, oui ce film aurait dû arriver après un ou deux épisodes consacrés à ce seul Batman duquel, finalement, on ne sait rien mais vu le reste, franchement, je te propose qu'on pinaille pas et qu'on s'en tienne à une révision technique : Affleck est bon, le costume est classe : viens on est content.


L'autre aspect positif du film est à mettre particulièrement en avant parce que c'est aussi le plus rageant de tous. Le film, très long, prend le temps de se lancer dans des considérations philosophiques et politiques sur la figure du héros et en particulier sur celle de Superman. Car le propos principal du film est le suivant : est-ce vraiment si bath d'avoir un mec en slip capable au moindre pétage de plomb de pulvériser ta mère, la terre et Scarlett Johansson ? Car Superman est un dieu, une force au-delà de ce qu'un humain peut se figurer et, vois-tu, c'est un peu lui le patron du sauvetage-game. A côté, notre ami la chauve-souris est une petite gonzesse tout juste bon à tabasser des clowns en fiat customisée. Du coup il est plutôt dans le camp de ceux qui veulent soulever la petite reum de Kal-El pour le renvoyer sur Krypton par la peau du derche. Car qu'on ne vienne pas me faire croire que Bruce Wayne s'oppose à Superman pour des considérations d'ordre philosophiques. Ou alors le film est si mal branlé que j'ai surtout eu l'impression de voir une petite pucelle vexée de voir la fille la plus populaire du lycée lui piquer sa place de chef des pom-pom girls. Cela dit toute la partie du film plus "cérébrale" (je te demande de bien prendre en compte les guillemets qui sont, je te le jure, utilisées à dessein) est assez intéressante, elle clive, oblige à choisir un camp, un peu comme Civil War avait tenté de le faire en moins bien, je trouve.


Sauf qu'en lisant le scénar', notre ami Snyder a dû se dire : "mais pourquoi elles parlent, les danseuses ? C'est quand qu'on fait la bagarre ?" et tout ce qui avait été construit et qui aurait, en plus, pu se prolonger sur plusieurs films, sur une partie importante du DCU, est réduit à néant dans la seconde moitié du film qui redevient un blockbuster débile à souhait avec, en plus de ça, une direction artistique rendant hommage à l'art raffiné du vomi dans les chiottes après abus de vodka-pomme. On a beaucoup parlé du retournement scénaristique qui fait finalement de Batman et de Superman des alliés plutôt que d'en faire des ennemis. Certains ont ri, d'autres ont été scandalisés, d'autres encore s'en battaient les couilles n'ayant pas vu le film pour cause d'autres choses à foutre que de voir deux majorette en venir aux mains mais, au final, peu importe. La seule chose à retenir ce n'est pas la manière par laquelle ce retournement arrive, mais bel et bien que ce retournement n'aurait jamais dû arriver. Pourquoi blablater pendant deux heures sur deux conceptions de la société et de la place des surhumains dans celle-ci pour au final accorder les avis sur la base d'une connerie aussi grosse que le nom de la reum des deux lascars ? Il fallait que cette divergence soit irréconciliable, quitte à ce qu'elle soit mise de côté le temps de vaincre un ennemi plus important que les enjeux moraux établis. Cette erreur d'écriture ne rend pas le film con pour autant, il le rend simplement, et c'est encore plus grave, parfaitement vain.


Ce qui le rend con, par contre, c'est tout le reste. Batman v Superman est un film qui a complètement digéré les codes du jeu-vidéo. Et je pense qu'on peut se mettre d'accord sur le fait que les jeux-vidéo c'est sympa, mais qu'on laisse le cinéma aux adultes et qu'on vienne pas nous briser les noyaux avec un médias de divertissement pur duquel on n'a rien à attendre de plus que cela. Le cinéma doit être plus que du jeu-vidéo, c'est impératif, sinon il mourra, et il faut que l'un d'entre nous aille faire comprendre ça à Znack Snyder urgemment. Dans Batman v Superman on a les phases d'exploration, les cinématiques pour comprendre un peu les relations entre les personnages, on a quelques blagues pas marrantes, on a les scènes d'action puis on a le boss de fin. Le boss de fin évolutif, attention ! Quand tu penses l'avoir vaincu une première fois, tu te trompes massivement parce qu'il se transforme au contraire en une créature encore plus puissante et visuellement infâme. Pour gagner il faut taper son point faible indiqué en rouge (ou en vert pour le coup).


Tu l'auras compris, toutes les scènes d'action du film sont nulles. Toutes sans exception. C'est mal filmé, c'est moche, c'est bourré d'images de synthèse abominables, c'est incompréhensible et ça manque de ce petit truc en plus qui rend les coups physiques, violents. Et je parle même de la grandiloquence du tout qui confine parfois au ridicule le plus absolu. A ce propos, puisque ce film est le second du DC Cinematic Universe et qu'on a déjà un Doomsday qui fait la taille d'une planète et qu'on essaye d'abattre à coups de bombe thermonucléaire, comment on va faire, ensuite ? Comment on va faire pour que les prochains films soient toujours plus grands, toujours plus exaltants, toujours plus fous ? Parce que là, si vous nous ramenez du Joker ou même du Bane, permettez-moi de vous dire qu'on va rigoler. Batman vient de se débarrasser d'un monstre "invincible", gigantesque, capable de raser une ville entière et de faire des milliers de morts, qu'est-ce que tu veux nous impliquer dans un combat contre un circacien dérangé et un asmathique nyctalope ? Ce film a voulu aller trop vite, faire trop de choses à la fois, ce qui se ressent d'un point de vue scénaristique puisque les scénaristes essayent déjà de mettre en forme les éléments de la future Justice League, tout en présentant Batman, Luthor, Wonder Woman et en racontant un peu une histoire parce que c'est quand même pour ça que j'ai payé mon billet, espèce de batârd long-termiste. Au final on a un film qui cède à l'action la plus décérébrée, la plus laide tout en n'arrivant pas à bâtir un scénario qui se tienne dans le présent et dans le futur qui se profile. Tu parles d'un ratage.


Sinon pour conclure vite parce que cette critique est sacrément longue et que t'as quand même une famille à nourrir et que ça commence à ressembler à une prise d'otages, ces conneries, alors que j'ai quand même l'impression de pas avoir tout dit, d'avoir éluder plein de trucs. Enfin bref : pour conclure on dira que les personnages secondaires puent du cul. Jesse Eisenberg en Lex Luthor va te faire comprendre violemment la définition de l'expression "avoir les frissons de la honte" tant il est outrancier, excessif, cliché, ridicule. C'est une caricature du méchant favori des films actuels, c'est à dire le geek génial mais barjo, attachant car excentrique. Je voudrais à ce titre lancer un appel à ces messieurs d'Hollywood : Heath Ledger l'a fait, il a été génial. Vous ferez pas mieux alors passez à autre chose, bande de trompettes.


Amy Adams est mignonne et j'imagine qu'elle est là pour ça parce que sinon son rôle dans le film se résume à être sauvée pas moins de trois fois par son keum qui devrait franchement penser à la quitter tant sa propension à se foutre dans la merde et à faire n'importe quoi est un frein évident à sa carrière professionnelle. Enfin il y a Jeremy Irons en Alfred. Oui, oui, en Alfred. Perso je l'aurais mal pris, Jeremy. M'enfin qu'Alfred soit un homme mûr plutôt que vieux et que ce soit un geek atomique ne devrait pas nous choquer puisque toi et moi on s'est regardé les yeux comme des soucoupes devant Civil War en se disant : "merde, mais elle est bonne Tante May..." Ces enfoirés libertaires et gauchistes d'Hollywood respectent rien, qu'est-ce que j'y peux ?


Sinon y a Laurence Fishburne. Voilà.


Pour résumer on dira que BvS était un film au potentiel élevé, au propos parfois franchement pas con mais gâché par un scénario qui s'éparpille, se perd en incohérences et facilités pour finalement dynamiter tout ce qu'il y avait de plaisant en lui. C'est aussi un film visuellement atroce, artistiquement répugnant, réalisé avec les pieds des pieds de ce bon vieux Zack qu'on devrait au plus vite renvoyer dans le monde qui est le sien : celui du clip et de la pub. Autant vous dire que les bases jetées par ce film ne laissent rien présager de bon pour la suite du DCU, les premières bandes-annonce des prochains opus nous laissant clairement entrevoir la possibilité d'avoir affaire à des bonnes petites bouses FXisées jusqu'à la moëlle sur la base de palettes couleurs allant du bleu anthracite au gris foncé. Comme un bon vieux film français en somme. Cocorico.

Ruru_
5
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le 30 juil. 2016

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