Dans un pays africain dont on ignore le nom, Agu, une dizaine d'année, assiste à l'assassinat de son père et son frère par des troupes armées. Alors que la guerre fait rage, Agu n'a d'autres choix que de fuir son village envahi et se fait enrôler dans un groupe de combattants mercenaires.
Saisissant, Beasts of no nation est l'adaptation du roman de l'auteur nigérian Uzodinma Iweala. A l'exception des premiers plans qui puent la mièvrerie nous voici en présence d'un film qui semble se rapprocher au plus près du réel. Le travail de Cary Joji Fukunaga est particulièrement séduisant : des scènes de cruauté sans recherche du trash gratuit, le tableau d'une enfance violée sans passages psychologisants ou moralistes.Terriblement juste , l'oeuvre touche sans se perdre dans un pathos démesuré et donne matière à réflexion et à débats sans exprimer de la suffisance. Le choix de l'autonarration par l'enfant s'avère ici excellent. Beasts of no nation déjoue ainsi tous les pièges d'un thème particulièrement sensible pour nous donner à voir avec simplicité et puissance le portrait d'un enfant soldat dans l'enfer de la guerre. Alors que le conflit croit, Agu fait l'expérience de la violence, du manque de ses proches., de la perte d'empathie vis-à-vis des autres êtres humains, du sentiment d'appartenance à un groupe etc. Si la vie d'Agu a pris un terrible virage, le spectateur assiste pourtant en parallèle avec émerveillement au spectacle d'une forêt splendide, au délire grisant des chants et cris de joie du groupe, à la force d'une amitié indéfinissable entre deux enfants brisés. La réalisation nous plonge dans un monde où les sens prennent possession de l'oeuvre alors que la raison a déserté. La beauté esthétique du film sublime ce récit de la monstruosité. Dans ce tourbillon de la perte d'humanité, la beauté surgit par à coups et finit par exploser avec l'expression d'un repentir et l'esquisse d'un possible avenir.
Authentique et percutant, un long métrage d'une noirceur flamboyante.