Ben-Hur, c'est énorme !!! Epique !!! S'il y a bien un film qui pour moi mérite ce terme et tout ses oscars, c'est bien celui-ci. Mais Ben-Hur ce n'est pas qu'un film de décors et de mise en scène aux moyens pharaoniques. L'intérêt immense que je porte à ce film ne tient pas tant à sa course de chars (pourtant spectaculaire même encore aujourd'hui) qu'aux thèmes du film superbement traités.
Plus c'est long, plus c'est bon ? Un film qui dure plus de 3H00, ça pourrait paraître long mais le problème avec Ben-Hur c'est qu'on a le droit à une orgie de scènes plus jouissives les unes que les autres et ce notamment grâce à Jésus (hum désolé et je vais y revenir).
Quand je parle de Ben-Hur, je me contrefous un peu de la religion ou de mes croyances et je juge l'objet seulement en tant que film (voir ma critique de There Will Be Blood, à la morale radicalement opposée). D'ailleurs le film n'est qu'une fiction, tiré d'un roman écrit par Lewis Wallace, général américain durant la guerre de sécession et a subit d'autres adaptations. Non, ce qui m'intéresse surtout c'est de quoi ça parle et comment ça en parle et à ce titre, Ben-Hur parle tellement bien du sujet qu'il traite qu'il est l'une, voir la seule œuvre de fiction approuvé par le pape (ce que je me contrefous aussi un peu à vrai dire).
De quoi parle Ben-Hur justement ? De Jésus-Christ ? De Foi ? De compassion ? Et bien pas vraiment en fait, enfin pas directement.

Ben-Hur c'est avant tout l'histoire d'une vengeance. Oui, ma bonne dame ! C'est bien de vengeance, de haine, de violence et de sang que l'on parle dans Ben-Hur !
Toute la tension du film repose sur la confrontation déchirante de deux amis, devenu les pires ennemis et qui atteindra son apogée lors de la fameuse course de chars !
Au début du film, on nous montre l'amitié qui uni Ben Hur et Messala (d'ailleurs la fameuse scène où Ben-Hur et Messala entrecroisent leurs coupes suggérait clairement un lien plus profond que l'amitié, Wyler prenant le soin de ne rien dire à Charlton Heston). Ensuite, après se l'être fait mise bien pro... heu... après avoir refusé de trahir son peuple et avoir subit une énorme injustice de la part de son ami Messala, Judah Ben-Hur passe du statut de Prince à celui d'esclave et est envoyé aux galères. Durant toute son épopée, Judah sera confronté à la violence du monde et de l'être humain et sera dominé par sa soif de vengeance envers Messala.
Pour Messala, Rome est l'unique vérité sur Terre. Le monde romain fait de force et de violence est présenté ici comme tout puissant et immuable. Il exploite et domine les autres peuples (Ici le peuple juif représenté par Judah).
Bref, ce qui est important de comprendre c'est que le film est dominé par la violence et que l'histoire de vengeance ira jusqu'à son aboutissement (la mort de Messala).
Et c'est maintenant que je peux parler de Jésus et de toute l'ingéniosité scénaristique et de mise en scène autour de ce personnage. Les apparitions de Jésus sont d'autant plus jouissives qu'elles sont rares et qu'elles interviennent justement en périphérie de l'histoire principale, dans ce monde violent et cruel dépeint par le film. Paroxysme de la violence et de la vengeance atteint avec la course de chars donc où le spectateur peut être renvoyé à ses propres pulsions, à l'envi de voir Ben-Hur triompher et se venger.
Face au reste du film, Jésus apparaît comme « une anomalie », « une anomalie » visuelle et de mise en scène. Ce terme n'est en rien péjoratif, c'est justement tout le contraire. Jésus nous met un uppercut dans la face à chaque apparition dans le cadre. Toujours filmé de dos et souvent coupé à droite du cadre (comme s'il venait d'un autre monde et agissait en périphérie de l'histoire principale), on ne voit jamais son visage (ce qui rajoute énormément au mysticisme du personnage) et il y a aussi cette petite musique qui donne des frissons. Chaque apparition est comme une toile des plus grands peintres. Un instant figé dans l'espace et le temps. Or-gas-mique ! (Ok, j'arrête).
Le personnage de Jésus est là pour montrer un chemin différent de celui emprunter par Ben-Hur, pour venir en contrepoids à l'histoire principale et pour montrer une alternative au monde existant. A la fin du film, on assiste à la naissance d'une nouvelle ère pour l'humanité, d'un nouveau monde (voir le discours entre Ben et Balthazar).
En faisait le choix de dépeindre un monde violent et une histoire axé sur la vengeance, Ben-Hur est selon moi, l'un des rares films qui sache aussi bien parler de compassion sans que cela soit complètement cucu (American History X), soit complètement raté (La Ligne Verte, qui est le pire exemple que j'ai en tête). En mettant en parallèle vengeance et compassion, le film nous bouscule dans nos propres pulsions de spectateur, faisant comprendre l'inutilité de la vengeance et en nous donnant accès à une émotion plus élevée.
De plus, le film n'est en rien manichéen et s'interroge aussi sur la vraie nature de l'homme. Le personnage de Quintus Arrius nous apparaît d'abord comme un homme impitoyable et cruel (scène de la galère) avant de faire preuve d'empathie envers Ben Hur en faisant ôter ses chaînes. A l'inverse, Ben Hur sera transformé par l'envi de se venger avant de comprendre le message de Jésus.
Ce qui est fascinant c'est que William Wyler arrive à nous faire comprendre ce message émotionnellement et non intellectuellement. Le message de Jésus est un peu expliqué par le personnage d'Esther vers la fin mais c'est surtout la mise en parallèle des situations qui démultiplie la puissance émotionnelle et nous le fait comprendre.
Le meilleur exemple est la scène au début où Jésus donne à boire à Judah et où à la fin leurs rôles seront inversés. Autre exemple : Lorsque Quintus fait ôter ses chaînes à Ben Hur, on entend le thème de Jésus. Ici la musique joue vraiment son rôle de nous faire passer le message sur la nature de l'homme et d'en intensifier l'émotion.
William Wyler saura aussi exploiter ses 03h30 et en faire la force de son film. Lorsque Judah revient chez lui et retrouve Esther, on a vraiment l'impression qu'il s'est écoulé plusieurs années, ce qui renforce l'effet de nostalgie et l'amertume du temps perdu que l'on peut ressentir.
Plus on approche de la fin et plus le film se fait noir et désespérant avant de nous balancer le Miracle dont la puissance renvoie La Ligne Verte (toujours le pire exemple que j'ai en tête) dans les orties.
Sinon que dire de Charlton Heston qui est trop puissant. Des acteurs comme ça, on en fait plus. C'est l'époque où un acteur pouvait encore faire passer de l'émotion à travers un simple regard ou une simple expression. L'acteur jouant Messala, Stephen Boyd, est tout aussi excellent, il suffit de revoir la scène de sa mort pour s'en convaincre.

Bref, le film s'ouvre sur la naissance du Christ, se conclut sur sa mort et au cours de ses 03H30, William Wyler aura développé son film avec une grande rigueur pour délivrer son message. Alléluia !!!

Altharil
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le 10 nov. 2011

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