Jamais évident d’aller voir un film juste après que celui-ci ait eu l’Oscar. Forcément, il n’est plus vraiment possible de se laisser « surprendre » par un long-métrage qu’une académie présente désormais comme un étalon artistique. Est-ce la raison d’un certain scepticisme que j’ai à l’égard de ce « Birdman » ? Pas impossible… Parce que bon, moi je premier, je lui reconnais toutes les qualités. Je trouve la réalisation remarquable, astucieuse, inventive, le tout au service d’un propos lui-même intelligent et subtil, riche dans ses degrés d’interprétation et totalement cohérent dans sa démarche. Non, vraiment : ce film possède un univers indéniablement envoûtant, quant aux personnages, ils irradient l’écran tant ils sont remarquablement écrits et interprétés… Bref, voilà, sur le papier, je n’ai rien à redire. Dans l’idée j’adhère sans réserve aux choix d’Inarritu… Mais bon, force est de constater : dans les tripes, je n’y suis pas du tout. Deux heures durant lesquelles je suis resté distant, guère impliqué dans l’histoire et dans les préoccupations des personnages, me surprenant parfois même à regarder ailleurs et à ne plus vraiment écouter … Alors forcément, face à un tel constat, je m’interroge : pourquoi ? Trop d’attente ? Vision biaisée d’un spectateur qui ne vient plus découvrir un film mais juger un Oscar ? Peut-être il y a-t-il un peu de ça, ce n’est certes pas impossible. Mais je pense en toute honnêteté que la raison est bien plus simple. Pour moi, un film aura beau être remarquable dans son rendu visuel, dans sa cohérence de mise en scène, dans son interprétation, il ne me parlera pas si la démarche d’ensemble ne me parle pas. Or, avec le recul, je me rends compte à quel point la démarche de « Birdman » n’avait effectivement rien pour me plaire. Ce film, au fond, c’est un film d’états d’âmes ; c’est un film statique, c’est un film morose… Moi je n’ai jamais aimé les discours qui se limitent à de la simple plainte, sans vraiment ouvrir de voies vers un regard alternatif et dynamique. Or, pour moi, « Birdman » c’est un peu ça : un acteur qui se regarde le nombril, qui tape sa crise existentielle, et qui se limite à ne percevoir les choses que d’une manière qui ne pourra au final que le faire tourner en rond dans ses raisonnements. Alors OK, ce n’est pas inintéressant, c’est beau, mais moi je n’ai jamais été réceptif, dans quelque domaine que ce soit, à ces démarches qui se limitent à la simple exploration du « blues » sans jamais vraiment chercher à chercher une porte de sortie. Cette complaisance de l’artiste pour l’attitude blasée est quelque-chose qui ne me parle pas. « Birdman » ne me parle pas… Dommage, car il me parait évident, même avec le recul, que j’aurais sûrement crié au chef d’œuvre si on avait été en osmose en terme d’état d’esprit… Donc, à vous e juger désormais si, en toute connaissance de cause, l’aventure « Birdman » est faite pour vous…