On se demande comment pareille histoire n’a pu être adaptée auparavant. Et qui d’autres que Spike Lee aurait pu s’intéresser à cette histoire rocambolesque : celle d’un jeune policier un peu roublard, Ron Stallworth (un des rares flics noirs dans une Amérique divisée par la lutte des droits civiques, joué par John David Washington), qui va décider de s’infiltrer… Chez les ultraracistes du Ku Klux Klan. Du moins, au téléphone… Pour les contacts physiques, ce sera son collègue blanc d’origine juive (Adam Driver) qui s’y collera.
Plus habitué au ton sérieux et au brûlot engagé, Spike Lee s’adapte ici à son sujet en proposant un film qui marche sur plusieurs jambes : tantôt comédie pop à la Shane Black, tantôt film d’action très années 80-90, bourré de références autour de la blaxploitation (ce cinéma des années 70 où les noirs américains tenaient pour la première fois les rôles-titres)… L’équilibre n’était pas simple mais cela prend. Les dialogues entre les protagonistes font mouche, les scènes comiques fonctionnent à plein. Cela en grande partie grâce au casting réussi de BlacKkKlansman. Adam Driver et John David Washington rappellent les duos célèbres des films d’action américains et n’ont rien à envier à leurs prédécesseurs, qu’ils s’appellent Mel Gibson-Danny Glover (L’arme fatale) ou Bruce Willis-Samuel L. Jackson (Une journée en enfer).
Mais derrière le rocambolesque et l’absurdité des ultraracistes bas du front, il n’y a pas toujours de quoi rire. Le temps d’une scène d’une beauté froide, avec le grand Harry Belafonte, et d’une scène finale contemporaine, Spike Lee ramène son spectateur à la réalité (son unique but s’il en est, les références à un certain chef d’Etat américain étant régulières dans le film...), rappelant que le KKK et le racisme ne sont pas qu’affaire du passé. Indispensable et brillant.