Ni le film originel de 1982 ni les versions suivantes de Blade Runner n'appelaient de suite. Pourtant nous y voilà, le film culte ayant inventé le tech-noir a maintenant un deuxième opus.
Blade Runner 2049 dès son annonce a généré crainte et attentes. Craintes d'abord car il aurait été aisé de ternir la légende par mégarde tant l'atmosphère de ce monde est singulière. Attentes pourtant car la filmographie de Dennis Villeneuve semble être un sans-faute jusqu'à présent et qu'il a la qualité rare de faire des films intelligents, de faire confiance à son audience pour comprendre sans avoir recours à de l'exposition plate.


L'agent K est un répliquant qui se retrouve sur la piste d'un passé perdu de vue. Un passé qui nous ramène bien des années en arrière, avant le Black Out de 2022, à la poursuite d'un miracle.
Je conseille de regarder Blade Runner (la Final Cut de 2007) avant d'aller voir ce film bien que ça ne soit pas absolument nécessaire. Il y a des passages dont vous profiterez mieux en ayant le film de 1982 en tête.


L'intelligence de Blade Runner 2049 est de jouer des mystères du premier. La grande question de savoir si Deckard est, ou non, un Répliquant est évoquée sans être résolue. Il y a une multitude de scènes mises en parallèles d'un film à l'autre :
Dans le premier opus, la scène ou Deckard va dans un boui-boui pourri pour faire identifier l'origine d'une écaille et quasi-identique à la scène ou K fait identifier le cheval de bois.
La scène de la mort de K est également identique à la mort de Roy Batty, à la fois visuellement (la pluie dans BR, la neige dans 2049), et thématiquement puisque les arcs des deux personnages sont semblables : ayant enfin accepté leur nature de Répliquant, ils décident de leur plein gré de faire malgré tout preuve de compassion. Il est d'ailleurs intelligent d'avoir centré l'histoire sur K qui est le personnage avec un véritable arc émotionnel, le reproche avait été fait à BR d'avoir centré l'histoire sur Deckard alors que Batty était le personnage le plus intéressant, la critique ne pourra pas être répétée cette fois ci.


Pourtant il manque un petit quelque chose, l'identité de la ville à changé.
Elle est moins surpeuplée déjà. Malgré un premier plan prometteur de la ville vue du ciel ressemblant à un immense bidonville du futur, la ville ne parait pas bondée. L'immeuble ou vit K parait envahi par une population grouillante mais lorsqu'il est dans les rues, ce n'est plus du tout le cas. Il se fait aborder Mariette dans un café à l'abord confortable, étalé sur une grande place. Dans BR lorsque Deckard se fait aborder par Gaff il est en train de manger à un restau, serré contre ses voisins avec une foule circulant sur le trottoir derrière lui. La population grouille alors que ce n'est pas l'impression qu'on a dans BR 2049. Une grande partie de l'intrigue se déroule en dehors de la ville qui est quasi déserte ce qui n'aide pas non plus à la construction de cette ébullition.
Et puis l'atmosphere visuelle à changé aussi. L'original était hanté par une fumée épaisse et des contrastes monochromes extrêmement marqués surtout dans les scènes d'interieur. C'est d'ailleurs ce qui lui a valu d'être rattaché de film noir! La nouveauté étant de l'allier avec la science fiction pour créer le genre du tech-noir. Ici Deakins façonne une atmosphère qui lui vaudra probablement un Oscar (il serait temps) mais qui est tout de même singulièrement différente. La fumée est devenue beaucoup moins épaisse, à peine un voile, et elle ne sert qu'à peindre les contrastes sur des couleurs vives. L'atmosphere toxique est maintenant apporté par ces jaunes/oranges aux allures corrosives.


Blade Runner n'a plus grand chose le reliant visuellement au film noir, on est passé au monde de la couleur. Quand aux thèmes, un grande partie du questionnement sur l'humain dans le premier BR reposait sur la nature non-manichéenne de son héros et de ses antagonistes. Un autre élément tiré du film noir. Dans Blade Runner 2049 les personnages sont complètement manichéens, comme dans les films néo-noir, chacun appartient clairement à un camp mais possède tout de même une part d'ombre. Le questionnement sur la nature de l'être humain est simplifié lorsque les Répliquants sont des "gentils" combattants des "méchants"
Le genre néo-noir a émergé dans les années 70 (Chinatown, Taxi Driver) c'est à dire 30 ans après l'âge du film noir dans les années 40 (Le Faucon Maltais, The Third Man). Il est donc logique que 30 après l'invention du tech-noir dans Blade Runner, nous évoluions vers Blade Runner 2049 et le tech-néonoir

TheoC
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le 8 oct. 2017

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