Je connais très peu le cinéma muet, du coup je passe peut être à côté de références faites à cette période du cinéma. Cette méconnaissance ne m'a toutefois pas empêché d'apprécier l'hommage vibrant aux films de cette époque que propose ici Pablo Berger. Car Blancanieves touche au prime abord par la subtilité du noir et blanc de sa photographie. Très contrastée, mais également très fine, elle s'allie à un coup d'oeil à toute épreuve pour faire du film un chef d'oeuvre formel. Chaque plan respire la lucidité d'une composition efficace mais également spontanée, toujours rehaussée par des lumières qui semblent se plier aux exigences des artistes.

C'est totalement subjugué par sa beauté graphique que l'on parcourt Blancanieves, comme on mangerait des yeux une toile qui nous toucherait en plein coeur. Bien entendu, le sujet que s'approprie Pablo Berger se prête à l'exercice et sous ses airs de faux conte, permet au réalisateur et son DP de mettre sur pied des ambiances pittoresques qui font mouche. Dans ces tableaux de maître se promènent tour à tour des personnages eux aussi très caractérisés. Entre la jolie petite Carmen qui imprime sa silhouette à l'image, peu importe son âge, sa marâtre par intérim diaboliquement envoûtante, cette troupe de nains très touchants ou encore ces animaux noirs pourvus de cornes qui font presque parfois de l'ombre aux hommes qui les font courir, Pablo Berger anime ses tableaux avec beaucoup d'inspiration.

Dommage toutefois qu'il se laisse par moment trop aller à la contemplation. Cela se ressent d'ailleurs dans la bande son qui accompagne le film. Un peu trop redondante, elle peine en effet à suivre le rythme imposé par la précision picturale qui se joue à l'écran. Si l'on ajoute à cette répétition sonore un script qui prend également par moment un peu trop son temps, on n'est parfois pas loin de trouver le temps un peu long. Heureusement, dès que Blancanieves retrouve ses esprits et le chemin de l'arène, le rythme reprend de plus bel jusqu'à un final de toute beauté qui me restera probablement un moment en tête.

Une jolie découverte en somme, qui malgré ses faiblesses parvient à toucher par cet état de grâce qui vient par moment l'habiter, même si malheureusement les codes imposés par l'exercice de style auquel se plie Pablo Berger semblent un peu étouffer le potentiel d'expression présent dans le cadre. A défaut d'avoir des personnages qui peuvent s'exprimer verbalement, il aurait fallu pouvoir compter beaucoup plus sur la musique pour faire exploser totalement la beauté des images de ce joli conte moderne.
oso
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste L'ours, Homo Video, en 2014

Créée

le 14 févr. 2014

Critique lue 402 fois

7 j'aime

oso

Écrit par

Critique lue 402 fois

7

D'autres avis sur Blancanieves

Blancanieves
Grard-Rocher
10

Critique de Blancanieves par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Carmen vit en Espagne et dans ces années 1920 la jeune fille n'a pas été épargnée par les malheurs de toutes sortes. Son père était un célèbre toréro et lors d'un combat contre un taureau...

39 j'aime

26

Blancanieves
Rawi
8

Critique de Blancanieves par Rawi

Sur le même concept que the Artist, Blancanieves remet au goût du jour les films muets en copiant le style années 20. Là ou le film de Hazanavicius faisait montre de belles trouvailles de mise en...

Par

le 4 févr. 2013

37 j'aime

10

Blancanieves
Gand-Alf
8

Blanche-Neige et les sept toreros.

Le succès inattendu de "The artist" semble démontrer qu'il y a encore un avenir pour le cinéma muet, même discret, comme le prouve le second film de Pablo Berger, réalisateur du fort sympathique...

le 24 janv. 2014

33 j'aime

6

Du même critique

La Mule
oso
5

Le prix du temps

J’avais pourtant envie de la caresser dans le sens du poil cette mule prometteuse, dernier destrier en date du blondinet virtuose de la gâchette qui a su, au fil de sa carrière, prouver qu’il était...

Par

le 26 janv. 2019

81 j'aime

4

Under the Skin
oso
5

RENDEZ-MOI NATASHA !

Tour à tour hypnotique et laborieux, Under the skin est un film qui exige de son spectateur un abandon total, un laisser-aller à l’expérience qui implique de ne pas perdre son temps à chercher...

Par

le 7 déc. 2014

74 j'aime

17

Dersou Ouzala
oso
9

Un coeur de tigre pour une âme vagabonde

Exploiter l’adversité que réserve dame nature aux intrépides aventuriers pensant amadouer le sol de contrées qui leur sont inhospitalières, pour construire l’attachement réciproque qui se construit...

Par

le 14 déc. 2014

58 j'aime

8