Il fut un temps pas si lointain, où PT Anderson n’était pas obsédé par la toute puissance. Il avait un fond de romantisme, et pouvait s’attaquer à des sujets assez prosaïques, voire vulgaires, et aboutir à un choral. Tout ceux qui regarderont Boogie Nights, en pensant se rincer l’œil sur un déluge de fesses, en resteront pour leurs frais. En cinéaste éduqué, et surdoué, PT sait que la suggestion est supérieure au déballage. (On voit quand même une bite, mais bon…). Assez grosse d’ailleurs ! Bien monté, le gars ! Un cheval. Un…Mais passons…
L’industrie du porno, est montré, mais par derrière, derrière la caméra. Et il se passe des choses. Le producteur, Burt Reynolds. Sa femme, maitresse, actrice vedette, Julianne Moore. Le jeune premier, Mark Whalberg, explosif. Mark s’en sort haut la main, en faisant un mix improbable, entre Bruce Lee, et Rocco Sifredi. Un jeune con, bien monté, est embauché par le magnat du porno. Burt parfait en maquereau, et vendeur de viande fraîche sur pellicule, en fait une star.
L’obsession du super casting, PT l’a toujours eut. Et ça commence très bien. On les voit tous. PS Hoffman, WH Macy, JC Reilly. Une vraie foire à l’acteur. Rejoint par un Don Cheadle acteur porno lucide, qui pense à la réinsertion. La vision sur ce petit monde fermé, est très originale. C’est un peu l’insouciance des seventies, la piscine, l’argent facile, la disco, la coke. Et un puissant cameo, d’une ex star de porno, Gynger Lynn. Un plan récurrent, qui se joue entre performance d’art corporel, et voyeurisme mis à nu par les voyeurs eux-mêmes. Scène à la fois brutale de crudité, et criante de vérité, comme un éclat de rire. Excellent.
PT passe pas mal de choses en revue, et passe par la comédie. Il parle de la transformation du business en industrie. Le cinéma porno, de genre mineur des années 70. Puis les années 80, avec les porno en format vidéo, fait à la chaîne, à but masturbatoire uniquement. C’est très bien montré. Comme le passage de l’innocence à l’âge adulte. Don Cheadle veut monter sa boîte, et vivre le rêve américain. Vendre des sono de haute fidélité, c’est son rêve. Il faut beaucoup d’argent pour commencer. La banque lui refuse le prêt. Pourquoi ?
Réponse : « Vous êtes pornographe, monsieur. Nous ne finançons pas la pornographie chez nous.»
Réplique : « Je ne suis pas pornographe. Je suis acteur ! » Tout est dit. Les années 70, résumées en une phrase, et un plan. Puritanisme, et liberté d’expression.
Le héros du film, qui a choisit comme nom de scène, Dirk Diggler, (tête de bite), pour les intimes, s’essaye à la musique, et ne se rend même pas compte que le succès lui est monté à la tête. Il veut devenir star du rock, réinsertion logique pour tout acteur, ou mannequin qui se respecte. Qui lui a dit qu’il avait ce talent là ? Personne. Dirk c’est un con. Dick. Ou Dirk, pense être réellement une star ( ?!) Et Burt pense réellement que ses productions sont de qualité ( ?!) PT les regarde comme on regarderait des artisans qui font des films de séries Z, Nollywood, mauvaise qualité, navet X, avec des scénario niveau 1 ou zéro. Mais tout le monde sait que le porno, c’est un plaisir coupable avant tout. PT c’est un esthète, et il n’a pas la main lourde. Il parle avant tout d’une époque. Narration démultiplié, plusieurs acteurs principaux, des seconds rôles aux fulgurants mis en avant. C’est riche, comme d’habitude chez PT, et la maîtrise est déjà là.
La roller girl, qui n’est qu’une autre face de la cheerleader, phantasme américain absolu, jeunesse éternelle et performance, baiser la tête vidée ; et elle va ouvrir les yeux, prendre quelques coups, et reprendre les études. Mais Dirk, lui…quel con.
PT ne se fait pas dévorer par son sujet X. Il fait un grand tableau pop art, et nous fait découvrir une autre facette, souvent cachée, d’une époque révolue, et rêvé, et un jeune acteur, qui a déjà du métier. Un certain Mark Whalberg, que l’on verra curieusement que dans des seconds rôles, par la suite.