Jack est un jeune homme d'apparence fragile, sa naïveté peut sembler exagérée et le rend un peu ridicule. Il sort de prison sous une nouvelle identité. Quel crime a-t-il commis? On découvre parallèlement le portrait d'Eric, gamin faible et brutalisé, qui pourtant devient l'ami de Philip, un pré-ado aux actions violentes. La narration passe habilement de Jack, qui goûte à la vie normale d'un jeune adulte (un travail, des copains, des fêtes, et même l'amour) à Eric, qui fuit sa réalité sordide (père alcoolique, mère cancéreuse, école où il est le souffre-douleur) pour sécher les cours et vivre des échappées douces-amères en compagnie de Philip, dont on apprend qu'il est abusé sexuellement chez lui.
La nouvelle vie de Jack, les évasions d'Eric: deux tableaux de liberté dont on pressent qu'ils ne vont pas durer. Qu'ils vont mal, très mal finir.
Le suspens monte: qu'est-ce qui a conduit Eric/Jack en prison ? On apprend dans la première moitié du film qu'il a assassiné une petite fille. Mais qui est-elle? En effet, nous ne la verrons que dans les 15 dernières minutes...
Un jeu de miroirs où le passé fait sans cesse écho au présent dans une symétrie cruelle.
Ironie du sort, c'est la mort d'une jeune fille qui a emmené Eric en prison, mais c'est la vie sauvée d'une autre fillette qui va conduire Jack tout droit en enfer. Devenu un héros local, un journaliste publie sa photo: il n'en faut pas davantage pour que son passé le rattrape.
Certaines scènes sont d'une intensité forte: la première expérience sexuelle de Jack par exemple, ou encore cette scène gorgée de malaise où Philip tue une anguille, comme pour donner un avant-goût de la violence sans borne de ce garçon. Ou encore ce moment où, alors que le visage de Jack se trouve sur tous les tabloïds comme "le monstre", une vieille dame qui ne l'a pas reconnu le traite avec douceur et bienveillance.
Certes, j'ai trouvé le héros peut-être trop friable et larmoyant par instants... Ou que la psychologie des personnages secondaires était bien amorcée mais laissée en suspens... Mais cela reste à mes yeux un film poignant, pas de ceux qui m'ont fait verser des larmes, mais qui m'a laissé une impression d'amertume devant cette vie gâchée.