Plus j'écris cette critique, plus je m'aperçois que je n'aime pas ce film

Comme il m'arrive régulièrement, je me suis lancé dans le visionnage sans avoir vu aucun trailer.


Quelle ne fut pas ma mauvaise surprise de voir qu'on reprenait très exactement les origines de Superman pour faire du protagoniste son antagoniste. Je trouve que c'est une flemmardise scénaristique absolue, d'autant plus qu'il n'y aura aucun super héros pour s'opposer à notre jeune équarrisseur en herbe. En ce sens, la création de l'antihéros ne porte pas son véritable enjeu.


Ca pose d'ailleurs une question. On a l'habitude de voire le super héros affronter le mal pour se révéler (le mal faisant parfois parti de lui-même, ses démons intérieurs). Mais le mad guy doit-il affronter le bien pour se révéler malsain ? Ben Solo alias Kylo Ren nous dirait oui sans hésiter. Mais est-il fondamentalement mauvais dans sa nature ? Même Kylo a des doutes. Alors ici, comment ça fonctionne ? Malheureusement, Brighburn ne répondra pas, et c'est d'autant plus dommage que le film se base sur le plus mythique des super héros, l'un des plus codifié, Superman. Ne pas réutiliser les codes ni même les traverstir (sauf pour ses origines), c'est juste une facilité, pas un choix judicieux.


On ne sent effectivement presque pas le gamin hésiter, douter, se questionner. Au début, il semble être un enfant normal, un élève modèle voire surdoué, mais rien ne montre qu'il est véritablement hors norme. Et il devient comme ça, presque d'un coup d'un seul, un monstre. Parce que son couffin galactique l'appelle en clignotant en rouge avec une langue ET, il se dit comme ça que "tiens, broyer la main de la fille que je kiffe dans ma classe c'est une bonne chose, puisqu'elle n'a pas apprécié que je la matte par la fenêtre de sa chambre pendant la nuit en lui jouant des tours de magie noire sur l'écran de son PC. Moi je croyais que c'est ce que les filles aimaient, alors si elle aime pas, elle mérite une punition. On a ce qu'on mérite, non ?".


Mais d'où le jeune garçon modèle se met-il à avoir de telles pensées ? Était-ce un monstre depuis sa naissance ? Le couffin galactique a-t-il pris possession de son âme ou a-t-il simplement activé le mode gore préprogrammé dans le code génétique du jeune ? On n'en saura rien !


En résulte un revirement du personnage plus incompréhensible que brutal car il n'offre pas d'explication claire. Tantôt le jeune ne comprend pas du tout ce qui lui arrive et panique lorsqu'il s'aperçoit qu'il est "somnambule", tantôt il semble comprendre parfaitement son rôle et cherche à se jouer de son entourage comme si de rien n'était, alors qu'il laisse à chaque fois des preuves sanglantes de son passage comme s'il ne cherchait qu'à être démasqué. On me répondra que c'est juste la réaction d'un ado qui fait des conneries d'ado. Pff... oui, mais un très petit oui.


Parce qu'au bout d'un moment, on n'arrive même plus à comprendre le lien que le jeune entretien avec ses parents. Accorde-t-il encore de la confiance à sa propre mère ? Vers la fin, il semble que non puisque'il s'apprête à détruire la maison familiale avec elle dedans, mais dans la scène suivante il finit dans ses bras sans que rien ne montre qu'il cherche à la feinter. Il en va de même avec elle, qui passe son temps à le défendre d'un bout à l'autre du film malgré des éléments plus qu'inquiétants à son sujets et qui, sur un éclair de génie prévisible 1h à l'avance, réagit comme un chasseur avec sa proie, son propre fils je vous le rappelle. La mécanique ne fonctionne tout simplement pas.


Bien oui... autant un revirement d'attitude chez un super préado de l'espace qui ne comprend pas sa propre puberté quand elle est activé par un couffin galactique maléfique, à la limite on peut l'accepter si la chose est présentée à peu près correctement (ce qui n'est pas vraiment le cas, comme je l'ai dit on se demande ce qui anime exactement le jeune), autant pour la mère qui n'a pas de super pouvoir et gère sa vie de famille en mère modèle, le revirement en question demanderait qu'on s'y attarde beaucoup plus pour qu'il soit plausible. Là ce n'est pas le cas, la mère fait juste volte-face entre deux scènes.


Le scénario basique au possible et sa mise en scène approximative ne permettent pas du tout de comprendre les motivations, les psychologies des personnages. Les ficelles sont grossières et les dialogues manquent globalement d'être vraiment convaincants, voire carrément pas crédibles du tout. Et mon plus gros problème avec ce film se situe bien là : si ton film ne cherche pas à égaler ou même flirter avec le côté épique ou mythique d'un film de super héro, alors n'y fais pas une référence aussi énorme envers un super héro aussi énorme. Contente toi de faire un scénario bidon pour un message bidon voire pas de message du tout, juste du gore. Evil Dead, Braindead, Bad Taste, Street Trash (bon, mes références sont un peu datées, je l'avoue).


A propos de dialogue faussement intelligent, la palme revient à la tante pédopsychiatre lorsqu'elle accueille son neveu, le mad guy, qui lui dit "Je sais d'où je viens, je suis supérieur". Elle, qui n'a aucun moyen de savoir d'où il vient réellement, devrait être très surprise par une telle affirmation, voire presque choquée d'entendre ça de la part d'un môme qu'elle connait depuis qu'il est bébé et qui n'a jamais été violent. Mais non, elle lui répond avec tout le tact et la pédagogie inhérente à l'expérience de son métier : "je vais devoir en parler à la police". Espèce de connasse blondasse, t'as pas plutôt envie d'en parler à ta propre sœur, la mère du petit, ne serait-ce que pour lui demander comment il connait ses origines, et surtout, pourquoi il se sent supérieur pour autant ? Mais en fait, c'est pas directement au gosse que t'aurais dû poser cette question, en tant que psycho bidule ?


Donc voilà, on comprend assez rapidement dans le film que les personnages réagissent parce que le scénario le leur demande, les ficelles sont visibles comme un super héros en culotte courte dans un ascenseur, l'exercice narratif est pour ma part raté.


En ce sens, je trouve que Chronicle se débrouillait beaucoup mieux à ce niveau, car l'environnement familial et social de l'ado qui pétait un câble nous était présenté comme défavorable, et donc comme sa source de motivation principale. Le spectateur avait quelque chose sur quoi se baser. Ici, à part un couffin galactique qui clignote en rouge et dont on ignore tout, il n'y a rien.


Autre comparaison, puisque Brightburn s'inspire du mythe de Superman. Man of Steel nous proposait une véritable vision de l'esprit de famille, de l'enseignement qu'on peut y puiser, quelque chose qui montrait une ou même plusieurs voies possibles pour le héros.


Ici, en terme d'enseignement, le seul truc que je retient est le suivant et ressemble à ne blague avec Toto :
Le père et le fils sont à la chasse dans les bois Le père dit au fils que "bon, tu entres dans l'adolescence, si tu ressens une envie entre les jambes, genre en matant des filles et tout et tout, t'as quand même bien le droit de te frotter la nouille. C'est normal, les mecs, les vrais, ça bande dur." Son fils lui répond bizarrement "tu veux dire, maintenant ?". Le père, un peu gêné par la réponse de son fils mais finalement pas tant que ça, clos le sujet par un simple "bonne discussion, mon fiston !".


Désolé mais non, lorsque tu entames ta première conversation sur le sexe avec ton fils, tu ne termines pas une "bonne discussion" avec lui s'il comprend qu'il doit se masturber devant toi pour te prouver sa virilité. Non désolé, non, je n'ai pas de gosse, mais non ! Il est hors de question que je laisse croire à mon éventuel fils ou même à ma fille ou à quelque adolescent que ce soit qu'il ou elle doit se toucher pour me prouver quoi que ce soit. Le premier ado qui vient me voir en me disant ça, je le revoie illico sur Youporn. Et surtout si c'est mon fils, je cherche à comprendre pourquoi il s'imagine que se branler devant son père en pleine forêt est une preuve de quelque chose, parce que c'est peut-être moi qui me suit très mal exprimé et qu'il vaut mieux que j'évite d'ouvrir ma gueule si c'est pour obtenir des résultats de ce genre. Parce que ça fout quand même un peu les boules, non de dieu !


Dialogue de merde !


Un peu de spoiler sur la fin et son incohérence, au cas où vous n'auriez pas compris que le scénario nous prend pour des cons :


La toute fin nous laisse croire que le gamin va s'en sortir discretos, genre seul survivant et personne pour témoigner à son encontre, alors que :


a) son père gît quelques kilomètres plus loin avec un trou béant dans la tête, blessure par rayon laser à haute densité d'énergie sans aucun rapport avec un accident d'avion, je tiens à le faire remarquer;


b) les photos des précédents meurtres et donc de ses propres signatures sont toujours disponibles dans le dossier ouvert au commissariat;


c) lui-même a encore posé sa signature sanglante sur la carlingue de l'avion crashé, signe qu'il s'agit de l'oeuvre de quelqu'un, histoire de faire le lien avec les signatures des photos dans le dossier du commissariat;


d) sa tante et la fille de sa classe sont toujours en vie pour raconter leurs propres versions des faits, permettant de vérifier les différents alibis;


e) l'appel d'urgence depuis la maison familiale a été lancé bien avant que l'avion ne s'écrase, prouvant qu'il se passait déjà des incidents;


f) Jusqu'à preuve du contraire, la mère de la fille qu'il kiffait et qu'il a étripée est toujours accrochée dans le sous-sol de la grange;


h) le truc qui clos le sujet : le couffin galactique est toujours dans le sous-sol, le gamin ne peut pas l'enlever, c'est sa kriptonite.


Et lui, il mange un cookie, tranquille.
Mdr, la fin est un ratage éhonté.

Oatagaok
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le 6 sept. 2019

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Oatagaok

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