Poelvoorde, Bonzel et Belvaux livrent en 1992 un docu-menteur proprement jubilatoire et provocateur, se moquant bien du bon goût et de la bien-pensance. C'est arrivé près de chez vous, petite bombe filmique tournée à équipe réduite avec des moyens dérisoires fut la révélation du grand Benoît Poelvoorde : le personnage de Ben, sorte de dandy assassin à la verve bien trempée, est presque instantanément devenu une figure culte du cinéma francophone, au charme pratiquement irrésistible.
Drolatique et même assez subversif C'est arrivé près de chez vous prend le parti risqué d'adopter une forme télévisuelle visuellement peu séduisante, clairement proche du reportage. L'attractivité du film conçu à l'origine par le regretté Remy Belvaux tient énormément à l'interprétation caustique de Benoît Poelvoorde, constituant presque à lui seul une sorte de one man show génial et très original. L'écriture des dialogues, à la fois très travaillée et probablement en partie improvisée, participe beaucoup au potentiel humoristique de ce premier long métrage déviant et dérangeant. Comédie noire, grinçante, méchante presque, C'est arrivé près de chez vous demeure résolument consciente de ses imperfections, quitte à en jouer volontairement : le film n'est pas exempt de moments de flottements, de longueurs et de platitudes. Pourtant les scènes cultes, nombreuses et très efficaces malgré leur vulgarité, représentent d'une certaine manière le miroir d'un média sensationnaliste et voyeuriste, qui présente cyniquement le quotidien morose voire misérable d'une Belgique aux allures sinistrées : c'est là l'intelligence d'un film qui ne cherche finalement pas à complaire mais davantage à déranger et à questionner. Une excellente comédie.