Woody Allen à toujours eu une carrière en dent de scie, avec des films aux qualités variables pouvant donner le meilleur comme le pire. Il faut dire que ça a toujours été un cinéaste très prolifique, ayant un rythme de production assez élevé sortant quasiment un film par an depuis les années 70, à ce niveau on ne peut pas toujours être au top. Mais il faut reconnaître que depuis les années 2000, il à tendance à être à la baisse, livrant probablement les plus mauvais films de sa carrière, le tout saupoudré de quelques rares fulgurances. L'année dernière il y a eu Irrational Man qui n'a clairement pas convaincu les critiques mais qui se révélait être un de ses films les plus incisifs et brillants depuis au moins 20 ans. Une oeuvre injustement relégué au rang de "mineur" alors qu'elle était d'une intelligence et d'une noirceur rare assez appréciable. Cette année, avec Café Society, il ouvre le Festival de Cannes (entre Allen et le festival c'est une histoire qui dure depuis longtemps déjà) et reçoit de la part de beaucoup d'excellents retours. Etant considéré comme un de ses meilleurs films du 21ème siècle alors qu'il est symptomatique de tout ce qui ne va pas dans son cinéma.


Allen s'emploi à décortiqué le monde des années 30 au sein de la Café Society, du cinéma et aussi de la pègre. Trois univers étroitement lié qui semble se répondre. Mais par dessus ça, il tente de conter une histoire d'amour dont seul lui à le secret. Et là sera un des problèmes du film, à trop vouloir en dire en si peux de temps, il survole les sujets sans les approfondir ce qui fait que le récit n'apporte rien de neuf sur eux. On se trouve devant quelque chose de réchauffer au sein du cinéma mais aussi au sein de la filmographie de Allen qui se répète et ne parvient pas à se renouveler. C'est du déjà-vu et il dose ici assez mal ses effets, notamment un running gag autour de la pègre qui devient redondant ou encore l'utilisation de la voix-off qui devient beaucoup trop permissive et prend bien trop souvent le pas sur l'intrigue. D'ailleurs l'intrigue amoureuse est assez lourde dans son traitement, même si elle dispose de très bonnes choses comme cette envie de dénoncer avec ironie l'hypocrisie et la superficialité de ce genre de relations qui se base plus sur le contexte que sur la force des sentiments. Les retournements de situations autour des intrigues amoureuses sont prévisibles et l'ensemble s'essouffle au fur et à mesure, car la première partie du film est assez réussi entre les touche d'humour bien senti et la découverte du milieu cinématographique. Après ça le film se fait moins piquant et peine à susciter le même intérêt. Les personnages sont intéressants dans la mesure où ils sont tous des métaphores de leurs propres situations, ils sont tous détestables ou pitoyables pour diverses raisons et donne à l'ensemble un aura satirique bienvenu mais qui n'est pas spécialement aboutie lors de la conclusion. Mais ce qui est gênant c'est l'utilisation qu'en fait Allen, ce servant bien trop de ses personnages pour parler avec lui-même et flatter son ego, ce qui est agaçant.
Le casting est globalement très bon même si Jesse Eisenberg n'arrive pas à être une figure Allenienne marquante. L'acteur sort très peu de sont registre de jeu habituel et ne se met plus en danger. Finalement il ne joue plus, il devient juste la caricature de lui-même et est un des gros points faibles du casting à cause de son cabotinage redondant. Par contre il est contrebalancé par l'excellence de Kristen Stewart. L'actrice prend très à cœur de faire oublier qu'elle à jouer dans Twilight et veut prouver qu'elle sait jouer. Sauf que ça fait maintenant quelques films qu'elle prouve être une grande actrice et ici elle crève l'écran par sa justesse, son ambivalence et son intensité. Steve Carell offre aussi une très bonne performance, montrant qu'il n'est pas qu'un acteur de comédie et qu'il à un potentiel fou pour explorer d'autres registres. Le tournant qu'il prend dans sa carrière est très prometteur. Le reste du casting n'est pas en reste et font du bon travail, on retiendra par exemple Blake Lively solaire et pleine de justesse mais qui est légèrement sous-exploitée.
La réalisation est sublime surtout ce qui entoure le travail sur la lumière et les cadrages. Woody Allen travaille pour la première fois avec Vittorio Storaro, le directeur photo de Apocalypse Now, et le duo fait des merveilles. Travaillant les effets de lumières de manière très contrastée et picturale, il fait sortir les silhouettes par les tâches de lumières donnant un rendu très proche des films des années 30 tout en y injectant de la modernité, la photographie n'étant rarement aussi bien utilisé dans un film en numérique. L'image est nette, les cadrages sont minutieux et la photographie retire le meilleur de ce que l'on peut faire sur pellicule. Le montage est assez énergique pour pouvoir accentuer les gags visuels tandis qu'il garde quand même la longueur des plans qui sont cher à Allen. La musique est feutré, très classieuse et retranscrit bien l'ambiance des années 30. La mise en scène de Woody Allen est élégante mais très classique. Hormis un plan séquence d'ouverture habile et bien orchestré, Allen ne prendra plus trop de risques misant sur des plans fixes et des champs/contrechamps. Le tout est très statique et parfois fade lors de la deuxième partie du film même si le tout ne perd pas sa maîtrise. On regrettera par contre des transitions entre les scènes mal gérés et qui utilise trop souvent le même effet.


En conclusion Café Society est un film tout juste moyen. Il est surtout sauvé par son casting impeccable, mis à part Jesse Eisenberg, et par un travail visuel admirable. Notamment la sublime photographie de Vittorio Storaro car hormis l'élégance et la maîtrise de sa mise en scène, Woody Allen ne se met que très peu en danger, faisant que l'ensemble à des contours assez ronflants. L’écriture est par contre réchauffée, le tout s’essouffle très vite, s'impose par sa lourdeur et sa prétention. Le film parle beaucoup pour ne rien dire et aligne des phrases toute faite pour se donner des airs intelligents mais agace par ses dialogues sur-écrit. Même si le terme est méprisable, "branlette intellectuelle" est ce qui conviendrait le mieux pour qualifier cette oeuvre. Après c'est loin d'être mauvais et certaines scènes fonctionnent à merveille, surtout dans la première partie, mais Allen se perd dans ses effets et réunis tout ce qu'il y a de plus agaçant dans son style, et retombe dans ses récents travers. Son cinéma qui était autrefois novateur et piquant, commence sincèrement à devenir insignifiant.

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le 13 mai 2016

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Flaw 70

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