Les icônes passent souvent mal à l'écran. A force de les idéaliser, on en oublie qu'ils ont été des hommes. Casimir, Alf et le père Fouras n'ont jamais pu sortir de cette auréole de sainteté qu'ils ont acquise. Che Guevara non plus, il n'arrive plus à sortir de sortir de ce t-shirt trop grand pour lui. Ou une trousse. Ou une casquette. Alors quand un réalisateur brésilien s'attaque à la légende cubaine d'origine argentine adulée mondialement, on regarde avec attention.
Les carnets de voyages du Che précèdent de quelques années son aventure cubaine. Et ses déboires péruviens. Ecrites à 23 ans, ces motorcycle diaries content l'histoire de deux amis partis de Buenos Aires pour remonter jusqu'au Venezuela, sur une moto aussi fiable que dangereuse. Récit initiatique plus que politique même si Walter Salles hésite pendant tout le film sur le sens de je "journal".
Cela commence comme un road movie, dans l'ombre des années 50 sud-américaines. Mais rapidement, le réalisateur choisit de confronter l'innocence supposée du héros au choc des civilisations. Le pauvre petit se rend compte que sa fiancée est une bourgeoise, que les paysans sont exploités et que la vie de mineurs, décidément, c'est pas facile. Il ouvre grand les yeux, se révolte et décide lentement mais sûrement d'abandonner ses études de médecine.
Pourtant, ce film ne manque pas de qualités. Les images sont splendides – mais comment pourrait-il en être autrement avec l'Amérique du sud – et la bande originale, composée par Gustavo Santaolalla, parmi les meilleures de ces derniers mois, savante orchestration de guitares et instruments traditonnels. Pris comme simple road movie, le film tient en haleine, tant pour ses acteurs attachants que pour le rythme qu'offrent les images.
Mais l'aspect politique du film est décidément trop lourd et caricatural. Il suffira peut être à ceux pour qui le Che n'est qu'une image de t-shirt. Les autres attendront un film traitant finement d'un personnage ambivalent. Ou se délecteront des superbes images.