Scénario :

Carrie est une jeune souffre-douleur, martyrisée par ses camarades de classes, élevée par une mère célibataire à moitié folle et bigotte. Furieux d'avoir été réprimandés pour s'être moquées d'elles, certaines filles de sa classe tentent de lui faire croire qu'elle a un ticket avec le beau gosse de sa promo pour lui faire vivre l'humiliation de sa vie. Parallèlement, Carrie se découvre des pouvoirs télékinétiques (sans doute réveillés par sa puberté tardive.)


Franchement COMMENT ÇA POURRAIT MAL SE PASSER ?


Ce film fait partie de mon "rattrapage culturel" version "je suis curieux de voir ce film"



En tant que sujet d'étude :



Carrie est un film que j'ai pris afin d'étudier l'adaptation des romans de Stephen King au cinéma. Car si le "maitre de l'horreur" a joui d'un succès assez dingue, il est aussi connu pour avoir critiqué les nombreuses adaptations de ses films


A vrai dire, il y a trois eu grosso modo étapes : La première située en grande partie dans les années 70/80 est lorsque l'auteur s'est fait connaitre et que de nombreux réalisateurs talentueux se sont emparés des droits pour adapter ses romans. La seconde, c'est l'ère 80/90 quand Stephen King à la télé était le synonyme de productions de téléfilm, parfois réussis (Ça) parfois complètement pérave (Simetierre, les Langoliers.) Enfin, la dernière ére 90/2000 celle où des réalisateurs comme Frank Darabont (les évadés, la ligne verte) ou Rob Reiner (Stand By Me, Misery) se sont dit qu'il ne fallait pas Stephen King comme un romancier d'horreur mais comme un romancier fantastique, voire dramatique.


Je vais parler de la première ère parce qu'elle est franchement intéressante : on a du Kubrick (Shining) du Carpenter (Christine) du Cronenberg (Dead Zone) pour des résultats qui sont toujours mitigés : soit ça trahit le livre (Shining) soit ils sont un peu fade dans une filmographie de "maître" (franchement Christine et Dead Zone sont rarement les films qu'on retient de Carpenter ou Cronenberg.) Et il y a ce Carrie de 1976 réalisé par Brian De Palma.


Et c'est clairement un de ses premiers films tant on a l'impression qu'il cherche à utiliser des tonnes d'effets, notamment durant la scène du bal : ralentis, caméra tournante, plan séquence, split screen (qu'il dira regretter.) Mais surtout, on voit que le film est en grande partie tourné à la façon d'un film d'adolescent normal (au point que certains acteurs pensait qu'il s'agissait d'un film comique) et s'inscrit dans le bouillonnement des premiers films d'horreur.


Le gars a aimé aussi se jouer de ses acteurs : soufflant des trucs dégueux à Amy Irving pour qu'elle paraisse dégouté, n'expliquant pas à certains acteurs qu'ils allaient mourir avant de faire jouer la scène de leur mort (et une actrice à failli finir à l'hopital avec ses conneries.) Il se joue aussi du code, en ouvrant sur une scène de douche montrant des adolescente à poil, ainsi qu'une scène proche de la masturbation... se finissant par la découverte des règles.


D'ailleurs, pas mal d'images du film vont être reprise par la suite : la main qui sort de la tombe, la symbolique chrétienne détournée avec St Sebastien dont la figure revient plusieurs fois. Il faut aussi se rappeler qu'à l'époque, on avait rarement des chrétiens fondamentalistes comme méchants (ou alors il faut en revenir au personnage de La Nuit du Chasseur, qui, lui, est un faux précheur.) C'était d'ailleurs une des forces du roman de King et ce film va forger dans l'inconscient collectif, l'image de la vieille femme bigotte a moitié illuminé. Il suffit de voir tout ce qu'un jeu comme Binding of Isaac à repris comme esthétique : l'enfermement dans la cave, la mère en peignoir avec un couteau, etc...


Et ça fonctionne, puisque Stephen King (qui avait jeté la première version de son manuscrit à la poubelle et était prêt à abandonné cette histoire) trouve que la version de De Palma est supérieure à son roman.



Mon avis personnel :



Arrivé à la moitié du film, avant même que le bal de promo ne commence, ma copine se tourne vers moi et me dit "ok, en fait, ils vont lui verser un seau de sang de cochon sur la figure, elle va s'énerver et tuer tout le monde." Et j'ai eu du mal à contenir un rictus de rire qui disait "purée, elle a tout compris."


Le gros problème de ce film, c'est qu'il est devenu très prévisible : soit parce qu'il a créé un cliché qui a été très réutilisé par la suite (la fille souffre-douleur psychotique), soit parce qu'il prépare vraiment son climax dans le moindre détail. Je pense que Stephen King lui-même en avait conscience, car son roman insérait son propre recul critique en y mettant des témoignages, des thèses autour de l'incident, des émissions, ce qui faisait que le lecteur savait déjà, avant de lire le film, que quelque chose de mal allait se passer.


Ce qui fait qu'une certaine partie du film se tire un peu une balle dans le pied : on sait très bien qu'il ne s'agit pas d'une comédie pour adolescent ordinaire : l'affiche (et le titre français) nous l'apprenne bien. Et puis les violons stridents à la Bernard Hermann dans Psychose nous donne des indices (en plus d'être un hommage très kitsch)


Pourtant, c'est justement dans les phases de film sur l'adolescence que Carrie s'est montré surprenant : ces moments un peu léger où les personnages reprennent vie. Ce moment où même si l'on sait que ça va mal finir, on voit Carrie et Tommy, on se dit qu'ils sont assez mignon tous les deux. On oublie un peu que ça va mal se passer. Au point que le film contient un plot twist bien plus intéressant :


Sue N'EST PAS MÉCHANTE DU TOUT. Et ce qu'elle dit à sa prof ou son copain... est vrai. Ce qui donne de l'ambiguité à la scène de tuerie de Carrie. Si on avait juste une gamine qui se venge de ses agresseurs au final, le spectateur serait limite de son côté... mais on a des meurtres violents de gens qui pourtant lui voulaient du bien.


Au final, même si le film est assez prévisible, il en reste sympathique, agréablement kitsch par moment (halalala, ces coupes de cheveux, ce John Travolta en "bully" (LE cliché le plus utilisé de l'oeuvre de King) qui boit de la bière dans sa caisse) mais bien tourné et remplies d'images hyper cultes (rien que le visage de Carrie couverte de sang) ce qui le rend toujours intéressant à voir.

le-mad-dog
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le 30 avr. 2019

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