Présenté en compétition au Festival de Cannes l'année du sacre des Parapluies de Cherbourg (Jacques Demy, 1964), le film d'Henri Verneuil est un film d'aventure digne de son époque. Et quoi de mieux que d'avoir dans ses rangs Jean Paul Belmondo, acteur en passe de devenir le roi de la cascade made in France. Face à un autre célèbre homme d'action Lino Ventura, Bebel s'en va dans le désert, cet endroit où il ne faut pas rester trop longtemps.
Dans un certain sens, le film a quelques points communs avec Le salaire de la peur (Henri-Georges Clouzot, 1953). Tous les deux sont adaptés d'un roman (ici Nous n'irons pas au Nigéria de Claude Veillot) et mettent en scène des camionneurs un peu perdus dans le désert, roulant sous le cagnard avec une cargaison importante. La différence est qu'il n'y a pas de contenu explosif dans les camions et que les deux véhicules n'essayent pas d'arriver en vie au point final.
Ici Bebel a volé un camion à son patron (Gert Fröbe aka Goldfinger) avec une marchandise à prix d'or qu'il n'était pas censé conduire. Comme dans Pulp fiction (Quentin Tarantino, 1994) avec sa fameuse mallette, on ne saura jamais ce qu'il y a dans le fameux camion. Verneuil privilégie une poursuite frappadingue entre Bebel et Ventura remonté comme un coucou. Le premier fait tout pour que le second ne le retrouve pas et ce dernier va perdre le nord plus d'une fois sur le chemin.
Bernard aka Blier les bons tuyaux apparaît comme un running gag jubilatoire, le bon gars toujours au bon endroit, au bon moment. Au bout d'un moment, on sait que s'il arrive quelque chose à Ventura et Reginald Kernan, il sera là pour leur sauver la mise. Sauf une fois, mais gardons la surprise. En sachant que Blier se réserve un gag hilarant à base de peinture encore fraîche.
Le film se dote même d'un twist d'autant plus cocasse qu'il est amené par une scène de baston pas loin d'être aussi interminable et drôle que celle de They live (John Carpenter, 1988). Verneuil signe un film d'aventure réjouissant, bien joué et où tous les personnages ont une carte à jouer. Bebel est le voleur, Ventura le soupe au lait pas si éloigné de lui, Kernan le mercenaire au passé trouble, Andréa Parisy la compagne pas si innocente qu'elle en a l'air... La caractérisation des personnages est simple, mais terriblement efficace, permettant au film de partir rapidement sur les chapeaux de roue. Simplicité et efficacité : parfois il suffit de pas grand chose pour signer un très bon film.