Il n'y a pas si longtemps, une époque que tout le monde ici a connu, il fut de bon ton d’arborer un fond noir sur lequel était inscrit "Je suis Charlie". Au contraire du jeu mondialement connu, ce temps fut celui du "cherchez le pas Charlie", mais là encore, comme dans le jeu original, il y en avait des faux, des ressemblants, le vrai "pas Charlie" se démarquant de tout à priori ou extrême politique et religieux tout en voulant affirmer un état d'esprit isolé du matraquage permanent du genre "il est mignon monsieur Pignon, il est méchant monsieur Brochant".
L'astuce était quand même compliquée, le seul, l'unique, l’inénarrable, l'incroyable "pas Charlie" glandant scrupuleusement dans sa tombe, sis le cimetière du Montparnasse sous la pierre attribuée à George Bernier, le professeur Choron.
C'est moche à dire mais qu'est ce qu'il se serait fendu la tronche de voir sa création tant conspuée devenir martyre du pays qu'il a tant provoqué. Alors ça semble déplacé, surtout quand on se rend compte dans ce film de l'animosité entre cet iconoclaste et deux des victimes qui ont réussi leur carrière sous sa houlette mais il est évident que l'intéressé est plus malin que ça.

D'ailleurs il nous l'explique lorsqu'il narre l'enterrement de son père, qu'il est jeune, un peu perdu, que son père est la première personne de son entourage qui meurt et qu'il n'a pas trop conscience de la situation, que toute l'assemblée réunie l'accable et que pris d'un élan de mise en scène spontanée, il s'écrit "Papa, Papa, NON" en s'accrochant au cercueil tout en y ajoutant des larmes de crocodile et alors, tout le monde était content. Il a pleuré. Ce fut un bel enterrement.
Si on prend en compte le travail de Pierre Carles à propos de la tonalité monocorde de la télévision, de la qualité des médias à ne ressortir qu'un seul aspect des différents problèmes de la société, on comprend alors que le professeur Choron n'était pas un provocateur, que nous avions juste affaire à un mec franc du collier.
Ben oui, la France n'est pas un pays plus noble que les autres, "les français" (imaginons Chirac utiliser cette expression) ne sont pas les plus altruistes de la terre et un nombre énorme de comportements de merde s'accumule tous les jours, tant au quotidien, en politique, que dans tous les corps de métier et en particulier l'armée (Ah ce passage anti homophobe quand il se rappelle la manière qu'il s’attire les faveurs de son gradé). Et ça la merde, George il aime bien.
C'est le mec qui ramasse ton étron abandonné à la va que je te pousse, qui le prend dans sa main, qui te demande pourquoi tu l'abandonnes comme ça au gré de tes prochains. Il va te le montrer sous toutes ses courbes, te dire qu'il est beau, que ces différentes nuances de marron sont unique au monde. Tout ça pour finalement te le mettre sous le nez et te rappeler que ça pue, comme tous les autres étrons que si ça t'emmerde de subir les étrons des autres, t'es pas obligé de faire subir les tiens à autrui.
Dans ce sens, le film est provocateur à la manière de Choron, car il n'invente pas les situations, il les montre, il les mets sous le nez. Et si tu trouves que ça pue quand il interviewe Val, Cabu ou Wolinski, il y a une bonne raison. Si tu trouves que ça sent meilleur quand parle Cavanna ou Siné c'est qu'on perçoit plus de sincérité et de tentative d'objectivité, d'ailleurs j'attribue sans conteste à Cavanna la palme de l'intervention la plus humble de l'histoire du reportage. Si tu trouve que sa sent la France profonde, c'est qu'on va découvrir ses origines et tu ressens un zeste d'ennui, c'est qu'une carrière n'est jamais parfaite.
Et si ça sent un peu l'hagiographie, un coup d’œil sur wikipédia permet de contaster quelques passage troubles dans son existence, et que je me fais avocat de la terreur, je n'aurai qu'une chose à dire.
Le mec était pote avec Reiser (en sachant qu'en plus d'être drôle et intelligent, le mec avait anticipé notre actualité bien avant sa mort il y a bientôt 40 ans). Poum, dans les dents

Toshiba
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le 13 déc. 2019

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