L'enfance traumatisée ou sa confrontation avec le monde adulte sont des incubateurs puissants dans l'écriture de Stephen King. Ça, Marche ou Crève, Stand by Me en sont de brillants exemples.
Il n'est donc pas étonnant de trouver, parmi les très nombreux ouvrages de l'écrivain, un thème par prolongement : l'adolescence. Christine fait parti de ceux-ci.
Pas forcément le plus inspiré. Et c'est un John Carpenter lui-même peu inspiré qui en signe l'adaptation (il sortait de l'injuste échec de The Thing). Quoiqu'il en soit, le livre tout comme le film est néanmoins efficace dans sa peinture d'une masculinité cherchant à s'exprimer par la possession et le m'as-tu-vu. Ce totem du machisme est souvent associé à un sport (au hasard, le football) ou aux voitures. L'activité physique a bien sa place dans l'œuvre, mais c'est le véhicule motorisé qui a la vedette.
Cette voiture (Christine) personnifie cette crise qui ronge Arnie (le personnage central), symbole d'une adolescence contrariée où le besoin de s'affirmer peut aller de pair avec celui de posséder. C'est dans cette extrémité que se niche la névrose (identitaire et sexuelle) de Arnie. Jouant parfaitement sur l'ambigüité qu'implique le paranormal (finalement, le tueur est-il toujours le même?), Carpenter tisse une fable noire pourtant très humaine autour de ces figures. De jeunes gens dont la tenue et la sympathie nous sont forcément familières. Mais ce qui est raconté ici, c'est ce carrefour entre deux-âges, celui où les choix doivent se faire. Et face à leurs instincts ou leurs problèmes, tous ne feront pas le bon.
Au delà de ça, le film ne pousse pas la réflexion plus loin. Il y avait pourtant de quoi, notamment dans une société encore trop marquée par le patriarcat. Mais ce n'est pas bien grave. John Carpenter n'a rien perdu de son génie à créer des atmosphères pesantes, tout en glissant parcimonieusement quelques instants de pure tension. Et les acteurs sont unanimement parfaits.
C'est déjà bien suffisant pour en faire une bonne adaptation (bien que Stephen King n'en soit pas fan) et un bon film.