Mais qu’est-ce qu’on a fait au bon dieu ?!

J’ai beaucoup de sympathie pour Fabrice Eboué, que ce soit en tant que comique qu’en tant que personnage public. Seulement voilà, en termes de cinéma, je suis désolé, mais pour moi ce n’est vraiment pas ça.


Rien que les premiers plans de ce film sont d’un triste !
Ça pique tellement ça fait téléfilm ! Et c’est aussi bien vrai d’un point de vue technique que d’un point de vue narratif ! Rololoh ! Mais le blaze total quoi…


En gros, lors de la première minute, j’ai eu l’impression que Fabrice Eboué me disait très clairement : « Bah en gros une histoire, ça se déroule point par point, dans l’ordre logique des choses… Et puis un plan, eh bah c’est juste là pour illustrer ce qu’on raconte dans l’histoire… Voilà quoi… »


Bref, dès le départ, moi j’en suis très vite venu à espérer que le scénario sache se faire très dense et très incisif pour compenser tout ça. Seulement – manque de pot – ce n’est même pas le cas.


Mais qu’est-ce que l’écriture est poussive et peu inventive !
Ne serait-ce que la phase d’installation : elle dure plus d’une demi-heure ! Que de temps de perdu ! Tout ça parce que Fabrice Eboué a décidé de présenter ses personnages les un à la suite des autres ! Et le tout bien longuement !
Le pire c’est que tout ce temps de bouffé n’est même pas au service de quelque-chose de subtil et de complexe. Non, c’est très caricatural et souvent très simpliste.


Alors attention, moi ça peut m’aller qu’on me fasse du caricatural et du simpliste, mais à condition qu’on sache tirer parti d’un tel choix ! Le récent « Un sens de la fête » du duo Tolédano / Nakache nous en a fait une très jolie illustration dernièrement. La caricature permet de poser le personnage très rapidement, ce qui booste le rythme et permet d’envoyer très vite de la péripétie. Pas besoin d’illustrer le truc pendant des minutes entières : la caricature a cet avantage de faire dans l’expéditif.


Eh bah rien de tout ça dans « Coexister ».
Ce qui pouvait être torché en cinq minutes montre-en-main s’étale ici encore et encore jusqu’à plus soif…
« Pourquoi un tel choix ? » pourrait-on du coup s’interroger. Fabrice Eboué est-il donc si peu sensible à la musicalité d’une bonne comédie bien riche et bien dense ?
Peut-être… Après tout ce n’est pas impossible…
Mais moi, personnellement, je pense que le vrai problème, il est ailleurs.
Le vrai problème, c’est que Fabrice Eboué n’avait finalement pas suffisamment d’éléments pour remplir le temps un long-métrage. Alors du coup, faute de prolixité, il a fait le choix de la dilution… Et diluer quelque-chose qui n’a pas vraiment de consistance à la base, ça tourne très vite vers la soupe indigeste.


Et c’est sûrement là que j’en veux le plus à Fabrice Eboué. Le mec a quand même un ton assez acéré sur ces questions là. Et à plusieurs reprises par le passé, il a su démontrer qu’il ne s’accordait que très peu de limites dans son humour. Or, d’habitude, c’est le politiquement correct qui bride une comédie et en tarie son humour qu’à deux-trois vannes assez convenues. Là, j’ai plutôt l’impression que si dans ce film on a au final que deux ou trois vannes assez convenues, c’est juste parce que Fabrice Eboué se l’est joué un peu feignasse.


Moi, ce film, je trouve que c’est un beau gâchis.
Oser se risquer sur un tel sujet juste pour nous refiler quelques blagues assez évidentes jouant souvent sur les clichés et la caricature, je trouve ça ni fait ni à faire.


Au final, j’ai l’impression que tout cela n’a été qu’une pathétique tentative de surfer sur le créneau de « Qu’est-ce qu’on a fait au bon dieu ? » - avec Christian de Tonquedec en prime – et cela à moindre effort. Eh bah non seulement c’est plus pauvre plus navrant et plus chiant, mais en plus je ne suis même pas sûr que ce spectacle soit meilleur en termes de lutte contre les caricatures et d’ouverture à l’autre, ce qui, au regard du modèle suscité, est quand même un comble…


En somme, voilà encore là un film bien navrant qui vient confirmer – si on en avait encore besoin – à quel point le genre comique se porte mal en France…

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le 31 oct. 2017

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