Il est Conan, un Cimmérien. Il ne pleurera pas. Alors je pleure pour lui.

Conan. Crom peut être témoin de ces multiples fois où j'ai repoussé cette critique. Finalement c'est une vieille connaissance d'Howard qui m'a poussé sur ce chemin ardu et excitant, zombiraptor. Au passant qui a eu l'idée saugrenue de jeter un oeil à ma prose, va donc chez zombiraptor en prendre plein les mirettes !
J'ai croisé Conan pour la première fois dans un vieux comic d'un oncle disparut. J'étais jeune, très jeune, 5 ans (oui, j'ai une mémoire encore intacte, c'est conseillé dans le domaine où j'officie pour le plus grand plaisir de mes étagères de dvds / blueré / livres et autres BDays), et je fus transporté par ces aventures qui tenaient en trois concepts : femme dénudée, roxitorage de créatures / guerriers / majax et, surtout, guerrier aux multiples facettes mais avant tout plein de fureur.

A l'époque je suivais déjà tout un tas d'autres histoires essentiellement à base d'avions (Buck Danny venait de croiser ma route) et Conan resta dans un coin éloigné de mes intérêts. Faut dire aussi qu'il y avait mon Goldorak en bois ...

Et puis vint le jour béni où cette cassette video me fit redécouvrir Conan. On est en 1983. Depuis je rend hommage à Crom pour Milius et Poledouris. Le film, on va le dire tout de suite, n'est pas un chef d'oeuvre absolu du cinéma. Oui il y a des défauts, nombreux, oui le jeu d'acteur est parfois limité, oui vive le carton patte etc etc. Mais ce film dispose d'une chose qui est rare, très rare même au regard de la production industrielle hollywoodienne : ce film a une âme. On peut me dire tout ce qu'on veut, ce film traverse les époques, et continuera à le faire, 3Day ou hologrammes à venir ou pas. Je ne connais aucun film au lancement aussi génialement adapté. Un dialogue père fils et on comprend que nous sommes ailleurs, dans un autre monde. Puis viennent ces 10 minutes, sans un mot. Une séquence rythmée par une musique dantesque : après l' "Anvil of Crom" de l'intro, l'enchainement des "Riders of Doom", "Gift of Fury" et du "Column of Sadness" transportent l'image ailleurs, bien loin de toute analyse classique. Le rythme colle tellement aux images que ça en devient presque surnaturel. Dans cette séquence apparaît le personnage le plus fascinant, Thulsa Doom, joué par la voix de Darth Vader, James Earl Jone. Plus que le Conan campé par Schwarzy, j'ai été bouleversé par ce regard, cette présence, cette folie.

Je vais éviter toute analyse en mode "Doom c'est le Kremlin / Conan c'est le triomphe de l'individualisme US prôné par Reagan etc etc". Deux raisons : primo Crom se moque de ces supputations intellectuelles ; son monde est brutal et, souvent, le côté intellectuel est porteur de plus de terreur que sa propre barbarie. Secondo, une déclaration d'amour ça ne s'explique pas.
Non, j'ai tout simplement envie de dire pourquoi il faut avoir vu ce film une fois dans sa vie, qu'il soit apprécié ou non à l'issue de la séquence.

Pour la séquence initiale donc, magistrale. Pour les dialogues : il y a en peu et c'est justement génial. Nous sommes face à l'image, ensorcellés par le son, et nous voyageons. Conan c'est la part de primitivité qui est en chacun de nous ; le barbare c'est aussi et surtout l'être qui n'a pas été modelé par une éducation, par des tonnes de savoirs accumulés, par la "civilisation". Cette brutalité a quelque chose de beau, de dérangeant peut-être, tout comme la violence d'Excalibur est belle. Il faut voir ce film pour le scénario, efficace (merci Stone) et intemporel : vengeance / trio d'un barbare, d'une guerrière envoûtante, d'un voleur et d'un majax. Une vengeance induit un méchant, une adversité à la hauteur : Thulsa Doom est l'un des plus grands méchants, l'un des plus fascinants, sans doute supérieur, on va y aller carrément, à Darth Vader qui, lui, fini par connaître la rédemption. Doom est dans son trip, jusqu'au bout, et nous restons fascinés par son regard. Et que dire de son orgie décadente portée par un rythme entêtant et jubilatoire ! Oui, il faut voir ce film.

Pour les poils qui se dressent lorsque chargent les guerriers de Doom emportés par Poledouris. Pour la mort de Valéria et ces larmes que Conan ne peut laisser rouler sur ses joues.
Pour la prière de Conan à Crom (non mais merde, envoyer son dieu au diable, c'est pas génial ça !!!), pour avoir lancé la carrière d'un Schwarzy qui connaîtra après des perles comme Predator, Terminator ou encore Total Recall. Pour comprendre que les remakes c'est souvent foireux, pour Poledouris, pour que Crom vive longtemps dans nos mémoires, pour se rendre compte qu'entre 81-82 fut un temps où le Crom du cinoche était bien luné (Choc des Titans, Conan le Barbare, Excalibur, Blade Runner, Evil dead, Les aventuriers de l'arche perdue, Mad Max 2), pour redécouvrir Howard et certaines de ses nouvelles (Les clous rouges, La reine de la côte noire, La tour de l'éléphant, par exemple), pour vous éviter de prendre une épée +12 / vorpale et tueuse sur un +12 - immunisée bien entendu aux jets de sauvegarde -, pour que j'en finisse avec cette phrase san fin, pour toutes ces excellentes raisons, quittez ce monde car ...

“Sache, Ô lecteur et spectateur, qu’entre l’époque où les océans ont englouti l’Atlantide et ses cités étincelantes, et l’avènement des fils d’Aryas, il fut un âge de légende où de lumineux royaumes s’étendaient sur le monde tels des manteaux bleus sous les étoiles. La Némédie, Ophir, la Brythunie, l’Hyperborée, Zamora avec ses femmes aux cheveux noirs et ses mystérieuses tours arachnéennes. Zingara et sa chevalerie, Koth, accolé aux terres pastorales de Shem, la Stygie aux sépultures gardées par les ombres, l’Hyrkanie dont les cavaliers portaient de la soie et de l’or. Mais le plus fier de tous les royaumes était l’Aquilonie, qui régnait en maître sur l’ouest fabuleux. Alors vécut Conan, le Cimmérien, aux cheveux noirs, au regard sombre, épée au poing, voleur, pillard, guerrier, aux mélancolies titanesques, aux joies colossales, pour fouler du pied les trônes les plus nobles sous sa sandale.”

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le 25 févr. 2013

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Aqualudo

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