Franchement je n’attendais absolument rien de ce spin-off, je trouvais le projet assez casse-gueule de vouloir encore une fois moderniser le mythe, enfin de lui apporter un héritage, une pseudo passation de pouvoir, la seule chose qui m’a fait venir c’est uniquement Stallone, pour voir comment il allait être utilisé loin de ses derniers rôles de Expendable & cie. Schwarzenneger de son côté n’a guère brillé dans sa tentative désespérée de come-back drama pour légitimer son statut d’acteur, Sly a lui l’avantage d’incarner ce personnage de Rocky depuis ses premières heures au cinéma, peut être une manière de boucler la boucle d’une carrière qui connait son épilogue. Alors ça passe ou ça casse ?


Adonis Johnson, fils du légendaire Apollo Creed s’engage à marcher sur les pas de son père dans la boxe, il quitte Los Angeles pour rejoindre Philadelphie où vit l’autre mythe local Rocky Balboa et acquérir son enseignement. Ce dernier, vieux et usé par les remords, fini par accepter en mémoire de son ancien illustre adversaire et ainsi propulser le jeune lion dans l’arène, l’ordre des choses en somme, mais sans prévenir un autre combat va s’engager …
Il est inutile de présenter cette saga culte démarrée il y a 40 ans et qui connue un succès international, le précédent film Rocky Balboa (2006) avait déjà pour ambition d’inclure la légende dans le XXIe siècle en le faisant remonter sur le ring, cette fois on retrouve Sly dans un rôle proche de celui de Mickey, le coach expérimenté, histoire de vraiment marquer le coup et illustrer cette nouvelle génération de boxeur/acteur incarnée par Michael B. Jordan.


Creed est véritablement un film sur l’héritage en tout point, c’est clairement établi au bout d’une bonne demie heure, que ça soit par le scénario, le duo d’acteurs, la réalisation ambitieuse et ce que le projet représente, je pense que le réalisateur a tout compris en ce qui concerne les réels enjeux de cet opus, que ça ne soit pas un vulgaire continuum pour jouer de la marque. Évidemment sous certains aspects on est aussi en droit de penser à une sorte de remake déguisé, allons bon c’est la mode, mais pour le coup c’est très cohérent, j’ai même envie de dire qu’il arrive à temps, Stallone c’est Rocky, et comme son personnage il n’a plus grand chose à prouver et à offrir à son métier, alors il fini par tout donner et le transmettre avec beaucoup de générosité, et ça se voit. B. Jordan n’en demandait pas tant et ne reste pas qu’un simple pion qu’on pose là, j’ai découvert ce type et il m’a vraiment convaincu, comme porté par le souffle de l’aspiration, il arrive a insuffler quelque chose à son personnage de "fils de" un peu paumé voulant construire son destin entre son entrainement intensif et sa relation avec sa voisine.


Ce qui m’a plu c’est aussi et surtout le rythme de ce long métrage, qui malgré ce manque certain d’originalité concernant son schéma narratif réussit à captiver et à nous sentir concerné par l’évolution de Creed Jr, sa complicité avec Rocky, l’attente du combat, puis le bouleversement, la subtilité n’est pas nécessairement de mise mais qu’importe le flacon pourvu qu’on ai l’ivresse. Et cette ivresse arrive lors du premier fight avec ce plan séquence sur le ring, tout simplement scotchant et percutant, c’est l’immersion absolue, pour le coup le procédé est utilisé à merveille pour délivrer son taux d’adrénaline, après ça on est je pense obligé d’être agrippé à son siège par l’action et les enjeux qui vont suivre, petit tour de force. Le parallèle avec le Rocky d’origine s’opère encore et toujours avec ce duel organisé à des fins purement commerciales et de prestige contre le champion du monde des poids mi-lourds, l’idée est récurrente, on est reparti pour le training jusqu’à l’affrontement final ... évidemment quoi d’autre ? C’est un peu ce qu’on demande après tout et l’attachement est fait donc ça marche admirablement.


La seconde partie laisse davantage de place à Balboa, à juste titre, plus axée sur l’émotion où Stallone pousse son cri du coeur, un symbole de mythe en perdition s’éteignant tandis que l’apprenti accroit sa puissance, cette fameuse passation de pouvoir est bien retranscrite, qu’elle soit par le cadre, les échanges ou simplement les regards, c’est à la fois triste et encourageant. Les clins d’oeil au passé glorieux de la saga s’incrustent comme la mélodie du thème de 1976 lors du footing ou le short aux couleurs du drapeau américain de Apollo, tout s’accélère jusqu’à l’ultime effort, une dernière demie heure des plus haletantes où niveau réalisation Ryan Cooger montre qu’il ne nous offre pas qu’un simple combat copié-collé, ce long travelling dans les vestiaires pour longer à l’épaule le chemin jusqu’au ring, jouant des points de vue, le sens esthétique est aussi au rendez-vous, et même si la séquence se montre passablement aberrante sur un moment en particulier elle reste diablement efficace.


Creed est en ce sens une sorte de suite-remake-spin-off qui assume entièrement son statut de passerelle générationnelle, le film est réussi grâce au cycle qu’il engage envers ses personnages et ses ressorts scénaristiques, la machine tourne et fonctionne, alliant drame et pur divertissement avec habileté, Stallone signe presque un rôle testamentaire, j’aimerais limite qu’il annonce sa retraite après ça, qu’il se retire avec les honneurs, la légende s’arrêterait là où elle a commencée, ça serait tellement fort.

JimBo_Lebowski
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le 30 déc. 2015

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JimBo Lebowski

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