Il y a des films qui nous laissent parfois perplexes, des films devant lesquels les mots ne viennent pas tout de suite, voire pas du tout. Dallas Buyers Club en fait partie. Émouvant, bien ficelé, convaincant, rythmé et réfléchi, une performance sans équivoque de la part de Matthew McConaughey, que rajouter de plus si ce n’est vous enjoigner à aller le voir ?

Inspiré d’une histoire vraie, Ron Woodroof, joué par McConaughey, apprend qu’il a le sida et qu’il ne lui reste plus que 30 jours à vivre. Il décide donc d’être cobaye pour tester l’efficacité de nouveaux médicaments agissants contre le sida. Progressivement il découvre l’inefficacité, voire la nocivité de ces médicaments que les laboratoires pharmaceutiques continuent de commercialiser. Profitant d’un sursis de vie, il va se lancer dans la contrebande de médicaments plus efficaces avec l’aide de deux compagnons, dont un ancien médecin.

Cinéaste aux multi-facettes, Jean-Marc Vallée signe ici une oeuvre à son image. Le film est contextuel, il se déroule en 1985, et n’épargne que peu de détails. Ainsi il semble débuter sur une simple histoire dramatique d’un homme qui n’a plus qu’un mois à vivre ; et au cinéma, ce genre d’annonce laisse rarement place à un scénario autre qu’un mois de débauche, d’alcool et de sexe pour profiter au mieux de sa vie ou un mois de bûchage intensif pour rendre le monde meilleur au possible. Mais Dallas Buyers Club multiplie les thèmes abordés et les messages délivrés. Retranscrivant l’ambiance des années 80 et la pseudo virilité exacerbée des cow-boys à cette époque, le message sur l’acceptation des homosexuels serait certainement celui qui est le moins subtil de l'oeuvre et le plus répétitif, surtout à notre époque où la « manifestation pour tous » nous casse encore plus le cul que la communauté qu’ils dénigrent. Malgré cela, il s’homogénéise plutôt bien avec les autres aspects du long métrage, que ce soit ceux sur la distribution ou la consommation de produits illégaux, la dénonciation de la corruption des laboratoires pharmaceutiques ou encore les différences d’éducation selon les milieux sociaux. Autant de thèmes que le film aborde à la fois avec simplicité et profondeur sans jamais briser son propre rythme.

Nous pourrions le comparer avec Effets Secondaires, de Steven Soderbergh. Les sujets abordés dans cette production sont également divers et le genre change au fil de l’avancement du scénario. Mais c’est malheureusement ça qui rendait le film instable et engendrait un désintérêt. A chaque fois que ce film abordait un nouveau thème, le rythme changeait et tous les enjeux différaient également, si bien qu’on était perdu toutes les 30 minutes environ. Cela procurait au spectateur un profond sentiment d’ennui et d’agacement, surtout que le film était dépourvu de légèreté et de pointe d’humour, un gros défaut de Soderbergh. Mais ce n’est pas le cas de Dallas Buyers Club qui parvient à maintenir exactement le même rythme du début à la fin, et un humour très bien dosé qui permet de ne pas rentrer dans le pathos dans les instants les plus dramatiques. Même lorsque la tension entre les personnages est palpable ou que les enjeux prennent de l’ampleur, le récit est traité avec suffisamment de légèreté pour maintenir une cohérence générale, que ce soit dans les situations, les actes ou les relations des personnages. Prenons l’exemple poignant de la scène où Ron tend sa main à Rayon et où ce dernier l’enlace. Des scènes parfaitement émouvantes sans en faire trop.

Jean-Marc Vallée offre donc certainement son meilleur film, ce qui lui permettra de gagner en célébrité espérons-le. De leurs côtés les acteurs sont tous très bons, spécialement Matthew McConaughey qui mérite tout autant un oscar que Léonardo DiCaprio.

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le 17 févr. 2014

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Notry

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