DALLAS BUYERS CLUB – 15/20
Auteur d’un de mes films préférés, l’euphorisant et poétique CRAZY, le Québécois Jean-Marc Vallée passe une nouvelle fois brillamment d’un style à l’autre avec un aplomb remarquable. Déroutant avec son Café de Flore qui jouait mystérieusement sur deux histoires séparées dans le temps mais qui finissaient pas se répondre, il revient avec Dallas Buyers Club à une storyline plus classique, plus linéaire en faisant confiance à son histoire, ses personnages et ses interprètes pour porter son histoire. Point d’effets superflus, très peu de musique (qui était un élément central de ses deux précédents films), un traitement âpre, dur et d’une sobriété remarquable.
Mais s’il devait y avoir un point commun avec ses deux autres réalisations, c’est la sincérité avec laquelle le sujet est traité et le relief apporté à ses personnages.
En choisissant d’aborder l’arrivée du Sida aux Etats-Unis à travers l’histoire d’un macho misogyne et homophobe, Vallée opte pour un angle audacieux mais au final terriblement efficace pour évoquer le désarroi des premiers malades, leur impuissance devant ce fléau incompréhensible et fondamentalement injuste et surtout leur ostracisation et la mise au ban de la société. Sa mise en scène sèche, simplement filmé avec une image granuleuse qui ancre le film dans les années 80, rend compte de la passionnante et effarante histoire du Dallas Buyer Club. Au-delà du drame humain, il agit aussi comme un révélateur des peurs d’une société réactionnaire et du cynisme des premières dérives du capitalisme sous Reagan, symbolisées par les enjeux financiers liés à l’industrie pharmaceutique.
Le récit d’une effroyable violence n’empêche pas un humour désespéré incarné par les deux protagonistes principaux, Ron et Rayon, magistralement campés par Matthew McConaughey et Jared Leto. Au-delà de leur impressionnante transformation physique, ils livrent tous les deux une performance inoubliable, frontale et sans filtre, s’oubliant totalement à leur personnage.
Dallas Buyers Club est tout autant l’histoire d’un combat que d’une rédemption mais qui se refuse à céder au pathos ou aux poncifs du genre. En s’effaçant presque pour laisser le spectateur recevoir le choc adressé par ses deux acteurs, Vallée atteint paradoxalement un juste équilibre et une vérité que la dureté du sujet rendait peu évidente au départ. Une gageure. Et une indéniable réussite.
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