Daphné est une jeune femme comme une autre. Elle travaille dans un restaurant le jour, sort en boite la nuit, séduit pas son physique avantageux mais ne ressent pas de sentiment amoureux. Evoluant dans la ville de Londres comme une ombre, la jeune femme est aussi discrète que tranchante dans ses réponses. Bref, Daphné est à la fois singulière et étrangement familière.
Blasée, la toute jeune trentenaire ne semble pas (ou plus) trouver d’étincelle dans sa vie. Ses changements récurrents d’amants, ses soirées arrosées et ses lignes de coke sont autantde tentatives de réanimation, en vain… Si elle aime philosopher sur l’amour (avec un grand ou un petit A), Daphné le cherche toujours. Inconsciente de son mal-être, la jolie rousse recevra cependant un véritable électrochoc, lorsqu’une nuit des plus ordinaires, elle assiste au braquage violent d’une épicerie de quartier. La distance qu’elle gardait entre ses sentiments se réduit considérablement et c’est un travail sur elle-même qui débute inévitablement.
La force du (premier) film de Peter Mackie Burns ne réside pas tant dans son histoire qui, il faut l’avouer, n’a rien d’exceptionnel. Ce qui en fait un métrage digne d’intérêt, c’est assurément la prestation impeccable de son interprète principale : Emily Beecham. Au contraire de son héroïne, qui évolue dans un univers superficiel, la comédienne a bien les pieds sur terre et assure sa performance sans bémol, avec une justesse et un cynisme qui impressionnent.
Quant à la réalisation, elle n’a rien d’excentrique et reste même plutôt classique. Le détachement qu’à la caméra sur le personnage de Daphné crée un vide, une distance entre le spectateur et l’héroïne, à l’image des sentiments qui l’habitent. Le rapprochement visuel n’a d’ailleurs lieu que dans une des dernières scènes de confidence (faite à son psy), où la réconciliation avec son entourage et elle-même semble être en marche. Les petits flottements dont fait preuve film s’effacent petit à petit, laissant la place à un humour grinçant et on pourrait s’en étonner, à une sorte d’attachement pour le personnage, aussi antipathique puisse-t-il être au départ. Peut-être parce que Daphne n’est pas sans nous rappeler des personnes croisées sur nos routes, ou parfois même un petit reflet de ce qu’on peut avoir été.
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