Film de fin d'études du futur réalisateur de Assaut et de The Thing Dark Star est un premier long métrage remarquable à plus d'un niveau. Sorte de chaînon manquant entre deux références majeures de la SF moderne ( d'une part l'incontournable 2001 de Stanley Kubrick et d'autre part Alien, le huitième passager de Ridley Scott ) cet essai cinématographique pour le moins prometteur et doué d'ambitions techniques et narratives fait figure d'oeuvre séminale étonnamment en avance sur son temps.
Arborant une esthétique fauchée doublée d'une humeur désinvolte, parfois proche de l'indolence Dark Star se situe pleinement et audacieusement dans le genre sus-cité tout en réfutant avec pertinence la séduction et/ou les attentes inhérentes à l'univers SF. Auteur à part entière, maître des genres qu'il explore avec la grammaire et l'écriture filmique qui lui sont propres John Carpenter n'a que faire du réalisme et de ses conventions... s'intéressant davantage à dépasser les sujets qu'il traite souvent avec précision et toujours avec respect, s'attelant à construire une Oeuvre coûte et coûte, se moquant du qu'en-dira-t-on.
Si 2001 reste LA source d'inspiration formelle et partiellement thématique de Dark Star ( mélange de Space Opéra et de politique-fiction, hégémonie grandissante de l'intelligence artificielle, sens du cadre mettant en valeur des formes géométriques voire abstraites ) Dark Star prolonge et pousse davantage la réflexion du film de Kubrick, allant jusqu'à interroger les relations entre l'Homme et la machine au gré d'un amusant raisonnement par l'absurde dans les dernières minutes du métrage. Burlesque et poétique le film de Carpenter se démarque de son modèle en en assumant la version parodique, roublarde et de petite mine mais brillante in fine.
Par ailleurs John Carpenter et son acolyte Dan O' Bannon mettent en oeuvre la matrice du premier Alien qui sortira cinq années plus tard, tout en développant certains éléments propre au survival : effet groupal et caractérisation très prononcée des personnages impliqués ( le quatuor de Dark Star annonce les flics barricadés de Assaut et les héros baroudeurs de The Thing ), enjeu narratif consistant à se dépêtrer d'une situation critique ( ici déprogrammer une bombe sur le point d'exploser, là neutraliser une Chose en forme de baudruche squattant les ascenseurs...). En somme ce premier long métrage reste un pur film de genre exploitant admirablement des moyens budgétaires pour le moins limités, preuve que John Carpenter s'avère être un réalisateur de très haute volée. Un film terriblement sousestimé.