El desierto de la empatía (oui j'ai fait espagnol deuxième langue, ça se voit je sais)

6,5 mais 7 parce que je suis cool.

Desierto avait en apparence de quoi donner envie et on peut dire que dès que j'ai pu le voir je me suis ruée dessus, le pitch était intéressant (surtout en cette période d'élections américaines) et la bande-annonce laissait entrevoir un film qui prendrait aux tripes, avec de plus deux acteurs principaux pas moisis, bref on aurait pu se dire que ça allait être parfait.

Vue ma dernière phrase j'aurais du dire "mais il n'en est rien" eh ben faut pas pousser quand même, c'était pas renversant, mais c'était pas nul non plus. Mais alors quel est le problème, qu'est-ce qui fait que, quand on sort du visionnage de ce film, on est déçu?

Le problème de ce film n'est pas vraiment son contenant, on a ici un film très esthétique, peuplé de nombreux plans très beaux voire magnifiques, Cuaron a un décor grandiose et il l'utilise bien, le désert devient un personnage à part entière du film, c'est en grande partie grâce à lui que la dernière course-poursuite du métrage est aussi réussie.
Les acteurs, du moins les deux principaux, JD Morgan en tête, portant le film, (car oui les autres on n'a pas vraiment l'occaz' de les apprécier puisqu'ils meurent tous plus ou moins en 5 secondes montre en main) sont très bons, en tout cas avec le peu qu'on donne sur leurs personnages durant le film (je reviendrai là-dessus), ils font le boulot.
La BO est quant à elle très bien faite aussi, elle immerge dans l'ambiance, la tension monte à certains moments grâce à elle, mais alors pourquoi grâce à elle et pas simplement du fait des scènes remplies d'émotion que l'on devrait avoir en face de nous?

Tout simplement car si sur le papier on a quelque chose d'intéressant et avec un beau paquet en prime, force est de constater qu'il n'y avait visiblement plus rien pour créer des personnalités et de la potentielle empathie pour nos personnages. Ou en tout cas pour presque tous les personnages...

Car si du côté mexicain, celui qui normalement devrait nous émouvoir, qui devrait faire palpiter nos petits coeurs de peur pour lui, on a plus l'impression d'être face à une armée de Jean-Jacques, à peine postulants pour les rôles des personnages lambdas de jeux vidéo qui se font tuer sans raison aucune et qui du coup sont aussitôt oubliés par le joueur; on a de l'autre côté un mec qui lui devrait être lambda (du moins dans cette partie des Etats-Unis), extrémiste qui passe à l'action et qui devrait simplement susciter notre dégoût pour les actes ignobles qu'il commet, on ne devrait pas vouloir le voir, on ne devrait pas le connaître, et pourtant c'est sûrement lui et son chien les personnages les plus importants du film, les plus intéressants, car eux on les voit depuis le début, on apprend un minimum à les connaître, on est même à la limite de s'attacher à eux!

Alors on pourrait se dire mais on s'attache sûrement aux autres aussi! Mais pas du tout! Et c'est bien ça le problème, on ne les connaît pas! Pour la plupart ils n'ont même pas de nom, on ne sait pas ce qui les pousse à venir faire ce voyage, ce sont simplement des corps qui meurent au bout de 5 minutes... Ils ressemblent plus à ces personnages de films d'horreur, vous savez, la fille, le gros qui forcément ralentit le groupe, le méchant-rusé qui ne s'en sort pas mieux que les autres, le mec qui essaye de profiter de la fille puisqu'elle est isolée... et bien-sûr, le héros, gentil, serviable, intelligent... Même le personnage principal n'a droit qu'à une vague présentation, il a un fils et il aime bien la mécanique... Palpitant.
De l'autre côté, malgré qu'on ne connaisse pas son nom, qu'on ne sache pas s'il a une famille (même si on devine aisément qu'il n'en a sûrement pas celle-ci résidant sûrement en son chien) on a un personnage qui intéresse, intrigue, on ne saura jamais pourquoi il a commencé à faire ça et d'ailleurs ça ne servirait pas à grand-chose, mais on a déjà l'idée qu'il n'est pas que ça, qu'il n'est pas qu'un tueur, que visiblement il ne s'est pas simplement réveillé un matin en se disant qu'il allait canarder du mexicain à la frontière pour passer le temps. Cette idée passe peut-être aussi par le fait de son amour pour son chien, la scène où celui-ci meurt est d'ailleurs la plus émouvante du film et c'est là que le bât blesse car non seulement on est plus triste pour la mort d'un chien que pour celles des êtres humains (car lui n'est pas tué en une seconde comme les autres) mais on est encore en plus à la limite de plaindre sincèrement son maître et de souhaiter qu'il se venge!

Du coup, sans rentrer dans la tête du réalisateur, j'imagine que ce n'était pas trop le but du film... Ou alors c'est tout de même un peu étrange.

Bref, si l'aspect purement esthétique de Desierto est très réussi, et permet de bien suivre le film sans s'ennuyer, on ne peut pas en dire autant de son fond, sûrement du fait d'une écriture qui recherche plus la tension et le rapport de force entre les deux parties qu'à un réel film humain sur un problème qui semble pourtant assez actuel.