Format extrêmement simple, âpre, trash sans boursouflure et sans voyeurisme, dénué de fioriture : plongée directe dans le quotidien de deux couples de gros toxicos qui errent dans les rues de New York comme des zombies à la recherche d'argent pour se payer leur prochaine dose de crack ou d'héroïne. Point barre. "Requiem for a dream", à côté, c'est un conte pour enfant. L'image est crado et c'est très bien, il n'y a aucune esthétisation de la misère ici, les réalisateurs ont juste suivi ces gens sur plusieurs mois en leur donnant 40$ par jour.


Et le quotidien d'un junkie jusqu'à l'os est rythmé comme du papier à musique : chacun a son moyen pour se faire du blé, mais l'objectif est irrémédiablement de se droguer et ensuite de penser à la prochaine occasion de se droguer. On peut donc diviser ce document en deux, les séances de shoot dans les halls d'immeuble dans lesquels ils ont réussi à se faufiler, et les séances dans les rues à la recherche d'argent.


Pour se faire de l'argent, les moyens sont assez diversifiés, et la misère de leur désespoir est souvent insoutenable en ce qui me concerne. Une femme se prostitue et se fait passer pour un flic (badge et menottes à l'appui) une fois montée dans la voiture des personnes en question, extorquant à l'occasion une centaine de dollars pour les laisser partir. Un homme se prostitue auprès de ses potes toxicos comme lui — une scène extraordinairement glauque de fellation dans une chambre miteuse, entouré de cadavres ambulants. Ces gens squelettiques ne s'alimentent jamais, d'ailleurs, on le voit bien dans ce docu.


Les séquences de shoot à proprement parler sont d'un sordide presque égal, dans des cages d'escalier plus ou moins miteuses, dans des chiottes insalubres. Ils se piquent sur leurs bras constellés de traces de piqures antérieures, ils lavent leurs seringues dans l'eau des chiottes. Le film regorge de détails de ce genre. La drogue comme seul moyen de se soulager, on a vraiment cette impression-là, d'une inexorable déchéance. Même quand le père de l'une d'entre eux leur loue un appartement, c'est un faux happy end. Ils sont toujours au bord du précipice.


Je serais curieux de savoir comment les auteurs ont approché ces gens car ils ont l'air de ne pas réaliser ou de se foutre totalement d'être filmés.

Morrinson
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Top films 2005, Mes Documentaires, Avis bruts ébruités, Cinéphilie obsessionnelle — 2021 et Dégueulasseries corporelles

Créée

le 3 juin 2021

Critique lue 165 fois

4 j'aime

Morrinson

Écrit par

Critique lue 165 fois

4

Du même critique

Boyhood
Morrinson
5

Boyhood, chronique d'une désillusion

Ceci n'est pas vraiment une critique, mais je n'ai pas trouvé le bouton "Écrire la chronique d'une désillusion" sur SC. Une question me hante depuis que les lumières se sont rallumées. Comment...

le 20 juil. 2014

142 j'aime

54

Birdman
Morrinson
5

Batman, évidemment

"Birdman", le film sur cet acteur en pleine rédemption à Broadway, des années après la gloire du super-héros qu'il incarnait, n'est pas si mal. Il ose, il expérimente, il questionne, pas toujours...

le 10 janv. 2015

138 j'aime

21

Her
Morrinson
9

Her

Her est un film américain réalisé par Spike Jonze, sorti aux États-Unis en 2013 et prévu en France pour le 19 mars 2014. Plutôt que de définir cette œuvre comme une "comédie de science-fiction", je...

le 8 mars 2014

125 j'aime

11