C’est l’histoire d’un vieil homme et d’un adolescent qui, face à l’adversité, s’unissent et finissent par devenir amis. Ou plutôt, c’est l’histoire d’un juif orthodoxe et d’un musulman originaire du Darfour qui, face à l’adversité, s’unissent et finissent par devenir amis. Le vivre-ensemble, la fraternité au-delà des schismes religieux et/ou socio-culturels… Oui, voilà notre sujet. Ajoutons à cela une myriade de personnages caricaturaux, dispersons une poignée de deus ex machina, ponctuons ce qui reste d’humour juif, de space challah et d’autres pâtisseries susceptibles de combler Fantan Mojah… et puff (the magic dragon) ! Sortie de la cuisse de Zeus avec la grâce d’un caprin, voici la 26ème cinexpérience : Dough.
Il serait aisé de réduire la dernière oeuvre de John Goldschmidt à ces quelques éléments factuels, quand bien même l’originalité (et la prise de risque) sont à Dough ce que le hibou est à la tractopelle. Cela en fait-il un film infâme ? Certainement pas, le résultat se révèle même, in fine, (modérément) appréciable. Dough jouit de personnages attachants, portés par des comédiens non moins passionnés accentuant au fil du métrage l’alchimie relationnelle ambiante. D’un autre côté… les antagonistes – un trafiquant de drogue hooligan et un concurrent commercial du personnage central aussi opportuniste que malhonnête – portent le sceau de la méchanceté gratuite… à l’aulne du conformisme du film, le manichéisme n’est jamais loin. Dough est mis en scène avec une fadeur apte à souligner la décrépitude de l’East End londonien, la photographie tenant plus du documentaire social (auquel Goldschmidt s’est livré au cours de sa carrière) que de la comédie. Du reste, l’œuvre est percluse de compositions de cadres absconses (allant jusqu’à désamorcer certaines percées humoristiques) et le montage reste aléatoirement réussi. Les plus exigeants seront révulsés par ces tares, les autres n’y verront qu’une pincée de broutilles presque attendrissantes, soulignant la profonde sympathie qui émane du projet. Sur bien des aspects, Dough est un gâteau raté, mais pétri d’intentions respectables : s’il a bon goût, sa texture laisse à désirer et son excès de sucre peut écoeurer. Ceci dit, qu’il peut être réconfortant d’assister à une telle exposition de bons sentiments.
À la manière d’un téléfilm de Noël (qui serait, certes, à la fois casher et hallal), Dough cabriole jovialement de péripéties en péripéties, sans souci de cohérence. L’œuvre perd consistance ce qu’elle gagne en rythme et la candeur excessive du récit, couplée au simplisme émotionnel de son message, peut émouvoir en cette période bien trop sérieuse. D’aucuns restent en droit de se demander si une œuvre aussi conventionnelle méritait réellement d’être exploitée en salles, à une époque où une kyrielle de projets plus ambitieux peinent à profiter d’une distribution correcte. C’est sans doute un autre débat, mais la question mérite d’être soulevée.