Draguse ou Le Manoir Infernal aussi titré Perversions Lubriques fait parti de ses petits films français sortis dans les années 70 à cheval entre pornographie et cinéma traditionnel et qui sont tombés dans les limbes de l'oubli. Si le film est sorti en VHS chez l'éditeur Gilda Vidéo dans les années 80 dans une version censurée, c'est encore et toujours à l'éditeur Le Chat qui Fume que l'on doit la résurrection de cette curieuse rareté avec une très belle édition Blu-ray qui vient toutefois nous rappeler que la rareté ne fait pas obligatoirement la valeur d'un film. Draguse est un film de Patrice Rohm qui tournera durant sa courte carrière des films d'exploitation essentiellement portés sur la fesse (Touchez pas au Zizi avec Brigitte Lahaie) et sous différents pseudos comme Alain Garnier (Helga La Louve de Stilberg), Mark Stern (Elsa Fraülen SS) et le rigolo Homer Bingo pour quelques films pornographiques (Les bidasses et la baiseuse). Draguse ou le Manoir Infernal qui est son second film comporte déjà les futures obsessions du réalisateur avec érotisme, pornographie, un peu de fantastique et même une louche de nazisploitation.


Draguse ou Le Manoir Infernal nous raconte l'histoire de David Léger un écrivain spécialisé dans les récits historiques mais qui se retrouve contraint par son éditeur à l'écriture de deux romans érotiques. Malgré une petite amie chaude de la cuisse et des rêves érotiques récurrents durant lesquels il se retrouve dans une maison en compagnie d'une charmante femme lui faisant de chaudes avances dans une ambiance de messe noir, David manque d'inspiration. L'homme décide alors d'explorer l'érotisme de son époque et se retire à la campagne pour s'isoler et essayer de trouver l'inspiration qui lui manque, il se retrouve alors dans la maison de ses rêves érotico-fantastiques.


Même si le film débute par une scène onirique qui flirte avec le fantastique dans une séquence faisant vaguement penser à de la magie noire, on comprendra bien vite à la fréquence avec laquelle le casting féminin se dessape pour se chatouiller le barbu que l'on est bien plus dans un film de fesse que dans tout autre chose. Et ce ne sont pas les trois pauvres gouttes de sang qui viendront à peine éclabousser la pellicule qui suffiront à faire de Draguse un film d'horreur. Le film de Patrice Rohm est bel et bien un film de cul mais il exploite tout de même en sous texte un univers légèrement fantastique et original avec cette esprit féminin habitant la maison et les rêves de cet auteur entre muse, fantôme, fantasme et succube. En dehors de ce contexte le film ne fera qu'alterner des scènes à caractère sexuelles allant de la pornographie à l'érotisme soft ou plus suggestif au fil de petites saynètes assez diverses. Entre les rêves érotiques qu'il fait, les histoires qu'on lui raconte pour l'aider à trouver l'inspiration et ses propres fantasmes notre auteur fait vivre sur l'écran différentes petites histoires érotiques dont il est le héros qui vont de la collégienne à couettes de 30 ans avec son professeur particulier à une séquence vaguement SM sous accoutrements nazis en passant par une histoire assez sympathique d'un homme offrant sa nièce à des inconnus pour ensuite les tuer et en faire des morceaux de bidoche pour sa boucherie … Même si la finalité reste toujours un peu la même, la variété de ton et de contexte permet à Draguse ou La Manoir infernal de ne pas sombrer dans une routine trop monocorde. Sans sombrer dans la franche gaudriole certaines scènes sont assez amusantes comme lorsque le héros tente de contenter sa petite amie tout en s'habillant pour un rendez vous le tout sur une musique entraînante de cartoon.


Un poil plus hypocrite le film semble aussi dans un premier temps se moquer d'une période durant laquelle le cul était bien trop vendeur à l'image des longues déambulations du personnage en quête d'inspiration dans un Paris dans lequel sex-shop et cinéma pornos étaient alors très nombreux au point de faire dire au personnage qu'on se croirait à Bangkok. Des images amusantes qui montrent des cinémas qui affichent sur d'immenses frontons à la fois des films classiques et des films érotiques et pornographiques aux titres évocateurs comme Certaines Chattes n’aiment pas le Mou  que le personnage commente avec un ironie pas très drôle du style : "Les Hôtesses du Lit, Ohlalala tout un programme le cinéma doit fournir les oreillers " . Les images prises un peu à l'arrache dans les rues de Paris sont d'autant plus amusantes que l'on verra de nombreux passants et passantes poser un regard insistant et curieux sur l'objectif.


Au casting de Draguse les amateurs du genre, comme les néophytes curieux reconnaîtrons des noms, des visages et d'autres endroits du corps familiers à ce type de production. On retrouve donc au générique du film Claudine Beccarie (Les PornocratesExhibition), Sylvia Bourdon ( Lèvres de SangLe Sexe qui Parle), Erika Cool et Monica Swinn dans le rôle de Draguse qui tournera de nombreux films sous la direction de Jesus Franco, tout comme le comédien Olivier Mathot d'ailleurs à la filmographie impressionnante avec plus de 130 films explorant toutes les facettes du bis francophone. Si Draguse ou Le Manoir Infernal n'est pas désagréable il n'offre pas non plus de franche occasion de s'enthousiasmer. Le film assez mou, il ne s'articule que sur un vague prétexte (en même temps ça reste un film de fesses) et certaines comédiennes sont joyeusement catastrophiques, la palme revenant à Martine Flety assez hilarante de non jeu en débitant son texte d'un ton monocorde et pas vraiment inspiré.


Draguse ou le Manoir Infernal n'est donc un petit bijou exhumé des limbes des films perdus et oubliés, mais simplement un sympathique petit film érotique avec deux trois séquences hard, un film qui tente de s’immiscer vicieusement dans le cinéma de genre mais qui visiblement cherche surtout à contenter les spectateurs érotomanes de l'époque. Encore bravo à l'éditeur Le Chat qui Fume pour son formidable boulot mais à 22 euros la galette ça fait cher le plaisir coupable, bien content pour le coup qu'un pote m'aie prêté le film avant de me décider à l'acheter, ou pas (??)


freddyK
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le 15 juil. 2022

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Freddy K

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