Nicolas Winding Refn surprend et secoue avec Drive, ovnis inattendu de l'année 2011. La bande-annonce, assez trompeuse, risque de décevoir ceux qui s'attendent à être embarquer dans de l'action pure et dure. Le long-métrage est en réalité aux antipodes des films de bagnoles multipliant clichés et courses-poursuites. Pourtant le spitch peut y faire penser, avec l'histoire de ce conducteur hors pair, cascadeur le jour et chauffeur pour malfrats la nuit. L'homme impose ses règles et ses codes, ne participant pas aux crimes commis notamment, ce qui au premier coup d'œil peut facilement faire songer au Transporteur. Mais au bout de quelques minutes seulement, il apparaît évident que ça n'a rien à voir. Drive jouit d'une mise en scène fantastique et singulière, ce qui n'est d'ailleurs pas passé inaperçu au festival de Cannes. La scène d'ouverture annonce d'entrée d'jeu la couleur, dévoilant une ambiance à la fois posée, nerveuse, concentrée et haletante. Dés les premières minutes notre attention est ainsi captée, et ce tout particulièrement par ce fameux pilote, aussi doué qu'énigmatique. En plus d'une mise en scène appliquée, le long-métrage bénéficie d'une photographie soignée, de plans éblouissants et d'une B.O électrisante, contrastant avec le calme ambiant durant la première partie du film. Une atmosphère d'abord posée, qui nous permet de mieux analyser le personnage du "driver", timide et peu loquace. Un rôle dans lequel se glisse avec virtuosité Ryan Gosling, d'une prestance et d'une éloquence fabuleuse, portant au passage en grande partie le film sur ses épaules. On notera également la présence d'un Bryan Cranston bienveillant mais fragile, ainsi que celle de Ron Perlman en dur à cuire. Dommage que Drive soit doté d'un scénario aussi simple et au développement si limité, seul défaut que je lui reproche. D'un autre côté, le film gagne en réalisme, nous transportant au cœur de sales affaires d'individus puissants et malhonnêtes, brisant au passage des vies, des rêves et des familles. Mais la banalité scénaristique est largement compensée par un esthétisme et une ambiance qui suffisent à entraîner le spectateur. A l'image de son personnage principal, le long-métrage est parcouru de longs silences captivants, qui en disent bien plus long que des dialogues superflus. Des instants qu'on ne songerait même pas nous-même interrompre tant ils sont révélateurs et intimes. Un lien touchant et pudique va se tisser entre le" driver" et sa voisine Irene au visage angélique, interprété avec discrétion et douceur par Carey Mulligan. Mais alors que la vie de la jeune femme et de son fils sont menacées, notre as du volant va dévoiler au grand jour un tout autre visage. A l'ordinaire silencieux et calme, on le découvre capable d'une violence inouïe, qui atteint d'ailleurs son apogée lors d'une scène dans un ascenseur, totalement fabuleuse. En y repensant, le personnage du "driver" a quelque chose de très chevaleresque, avec des valeurs relativement nobles, protégeant coûte que coût ses proches, et n'étant même pas intéressé par l'argent. Des critères assez hollywoodien quand on y pense, mais ici, ça passe crème. Une jolie claque en tout cas. Noir, silencieux, surprenant, doux, romantique, brutal, Drive est une expérience peu commune, qu'il ne faut pas hésiter à tenter.